Le RIC est-il vraiment la panacée de la démocratie ?

Le RIC est-il vraiment la panacée de la démocratie ?


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Beaucoup ont une vision idéalisée et pour ainsi dire magique du référendum d’initiative citoyenne (RIC), comme solution à l’impuissance démocratique qui accablerait nos systèmes politiques. Mais, à l’occasion de la Pâques orthodoxe que nous avons suivie en Grèce, nous revenons sur l’expérience de la démocratie directe à Athènes et sur ses échecs. En réalité, il n’est pas de système idéal et intemporel. Une démocratie n’existe que si et seulement si le peuple qui la souhaite la fait vivre.

L’impuissance démocratique est devenue une tarte à la crème contemporaine. Le peuple ne pourrait plus rien faire : aucune construction politique, aucune action émancipatrice, aucune rébellion contre une caste qui monopolise le pouvoir et le phagocyte depuis plusieurs décennies.

Face à ce constat sombre, on se souvient que le mouvement des Gilets Jaunes a souvent porté la revendication du référendum d’initiative citoyenne (RIC) comme solution miraculeuse à la frustration politique que nous vivons collectivement. Et, très souvent les partisans du RIC aiment à se référer à la démocratie à l’appui de leurs revendications.

Mais, précisément, le référendum d’initiative citoyenne est-il en soi une solution qui garantit la démocratie ?

Dans ce rappel de ce que fut la démocratie athénienne, ses avantages, mais aussi ses inconvénients, il nous paraissait important d’éclairer quelques aspects désagréables du régime d’assemblée, qui va souvent de pair avec le RIC dans l’esprit de ses promoteurs.

  • incontestablement, l’introduction d’un referendum d’initiative citoyenne pourrait apporter un surcroît de démocratie à condition d’être clairement « encadré ». En particulier, ce referendum n’a de valeur démocratique que s’il porte sur des textes de politiques publiques. Il ne doit pas servir à combattre les libertés (on ne peut pas faire un referendum sur n’importe quel sujet), ni à introduire une tyrannie d’assemblée
  • rappelons que le respect du droit, de l’état de droit, et spécialement du droit des minorités, est un marqueur de la démocratie bien plus fondamental que le droit de vote ou le scrutin majoritaire
  • toute constitution introduisant le referendum d’initiative citoyenne doit donc se souvenir que le vote majoritaire reste toujours une solution imparfaite pour accéder aux bonnes décisions, et qu’il ne peut en aucun cas remettre en cause nos droits fondamentaux et naturels (comme la propriété privée, la liberté de penser et de s’exprimer, la liberté d’aller et venir).

Dans le cas contraire, on sait à quelles extrémités un referendum peut conduire : à une véritable « démagogie », comme disait Thomas d’Aquin à propos des dérives de la démocratie. Dans cette démagogie, on connaît les affres qu’Athènes avait connues :

  • des mises à mort arbitraires de citoyens par des décisions majoritaires
  • une ruine des finances publiques par des politiques sociales abusives (l’Assemblée décidant de subventionner « le peuple » en dehors de tout bon sens)
  • des décisions politiques désastreuses pour la cité

Surtout, le régime d’assemblée à Athènes donnait lieu à un fort absentéisme des citoyens qui ne participaient pas aux réunions de l’assemblée… de telle sorte que la démocratie devenait l’affaire de quelques-uns qui la détournaient à leur profit.

Le passage en revue de l’histoire athénienne montre que les problématiques d’aujourd’hui en France existaient déjà à Athènes il y vingt-cinq siècles.

Au fond, ce rappel pousse à être humble : il n’existe pas de système politique idéal… Et seuls les contre-pouvoirs régulièrement réinventés permettent de limiter les dérives.


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