Crise sociale : la contestation monte contre l’ordre bobo…


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La crise sociale, dont la déflagration principale est annoncée pour le 5 décembre, commence déjà à faire des étincelles. L’action coup de poing menée hier par les agriculteurs autour de et dans Paris montre comment l’opinion bouillonne et piaffe d’impatience à l’idée de montrer au pouvoir exécutif combien elle rejette ses réformes. Aujourd’hui, la frontière franco-belge est bloquée par des transporteurs routiers hostiles à la taxation de leur carburant pour des motifs écologiques. De cet agrégat foutraque de contestations se dégage une unité : c’est l’ordre bobo, mélange d’écologie, de jacobinisme et de multilatéralisme qui est rejeté viscéralement par les Français, chacun pour des raisons différentes.

La crise sociale n’attendra pas le 5 décembre. Précédée l’an dernier par le vaste mouvement des Gilets Jaunes, elle brûle de reprendre, cette fois de façon à la fois plus organisée et plus foisonnante. Alors que la grande grève contre la réforme des retraites est pressentie comme une mise de genou à terre pour le pays, avant une probable reculade de Macron que nous annonçons depuis un an, d’autres segments de la population descendent dans la rue. Peu à peu se dessine la carte d’une France qui rejette en profondeur l’ordre bobo qui a récupéré le pouvoir en mai 2017.

La crise sociale commence par les agriculteurs

Hier, les agriculteurs ont bloqué Paris pour protester contre l’agri-bashing.

Le mouvement “soulevé par l’agri-bashing, les lourdeurs administratives, le pouvoir d’achat et la politique du gouvernement est parti pour durer”, a estimé Pascal Girin, président de la FDSEA du Rhône.

La formule de Pascal Girin résume assez bien les malheurs de la France dirigée par les bobos. L’Etat est partout, avec son cortège de réglementations ineptes et d’impôts en tous genres qui plombent la liberté d’entreprendre et le pouvoir d’achat. Cet Etat ne se contente pas de freiner l’activité du pays, il y ajoute des couches et des couches de leçons moralisatrices qui clivent les Français.

Les agriculteurs en sont les premières victimes. Les considérations des bobos sur les pesticides et la malbouffe deviennent si dogmatiques et si arrogantes dans leur rigidité qu’elles épuisent nos agriculteurs, pourtant vertueux dans leurs modes de production.

Résultat : ceux qui font le boulot l’arrêtent et bloquent les rues pour protester contre cette façon si parisienne de réduire le reste de la France au statut de larbin qui ne fait jamais assez bien les choses.

Le transport routier devrait suivre

Aujourd’hui, c’est aux transporteurs routiers de bloquer la frontière avec la Belgique pour protester contre la fiscalité très bobo sur le gazole, qui frappe leur profession. On se souvient ici que la jeune sous-ministre Brune Poirson avait plaidé, il y a quelques mois, pour la restauration de cette taxe bienfaisante dont le premier résultat fut une quasi-insurrection avec les Gilets Jaunes. Limitée cette fois aux seuls transporteurs routiers, la même taxe produit les mêmes effets.

Comme on pouvait s’y attendre, les transporteurs français, soumis à la rude concurrence des pays de l’Est, sont exaspérés par une politique franco-française qui les plombent un peu plus par rapport aux Bulgares, aux Roumains ou aux Slovaques :

« Le secteur contribue déjà fortement – et lourdement – au financement des infrastructures (plus de 7 milliards d’euros par an) et ce n’est pas le seul transport français de marchandises qui utilise le réseau routier français mais également le flux gigantesque des transporteurs étrangers », selon les deux organisations professionnelles de transports de marchandises qui protestent contre cette réforme de la fiscalité. « La concurrence déloyale déjà subie par le transport français de marchandises sera renforcée par cette inégalité ! » estiment-elles.

Evidemment, pas un bobo qui argumente aujourd’hui sur le mode du : « il faut bien taxer ce qui pollue » n’avouera que les transporteurs routiers, avec leurs gros muscles tatoués et leurs calendriers de femmes à poil dans leur cabine, les dégoûtent au point qu’ils préfèrent ne plus en avoir sur leur sol. C’est pourtant l’élément essentiel du suicide économique organisé par nos réglementations : il faut punir ces petites gens, ces « prols », ces laborieux, d’être des gens vulgaires qui prennent la place des pauvres Bulgares.

La France des régimes spéciaux donnera-t-elle le coup de grâce à Macron ?

Ces préliminaires constituent en soi d’excellentes mises en bouche et en jambes avant le grand mouvement du 5 décembre, annoncé de toutes parts comme massivement suivi. Selon nos informations, tout ce que la France compte de résistants à l’universalité de la Sécurité Sociale (les régimes spéciaux, les régimes autonomes, les fonctionnaires), ce qui fait plusieurs millions de personnes devrait être debout sur le frein, jeudi prochain, pour bloquer la réforme des retraites.

Ah ! si tous les couillons qui cotisent au régime général pouvaient continuer indéfiniment à se serrer la ceinture pour financer les déficits des autres (ce qu’on appelle couramment la solidarité…). Si tous ceux qui n’ont aucun statut et peuvent être licenciés en cas de difficultés pouvaient continuer à financer la protection de ceux qui ne le seront jamais… Le pays irait tellement mieux.

La question est de savoir aujourd’hui combien de temps la grève du 5 décembre sera reconduite, et si elle sera en mesure d’infliger suffisamment de dégâts au gouvernement pour que toutes ses aspirations à des réformes mal expliquées et souvent mal ficelées soient étouffées dans l’œuf. A voir comment Edouard Philippe s’agite en promettant d’être ferme, mais en annonçant déjà de grands reculs sur le calendrier, les services de renseignement ont dû lui remonter des notes très pessimiste sur la grogne qui s’annonce.


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