Mise au point musclée avec Thierry Meyssan sur la « dissidence » Lidl…

Mise au point musclée avec Thierry Meyssan sur la « dissidence » Lidl…

Dans cet entretien « mise au point » avec Thierry Meyssan, je développe la vision de l’information et de la pensée par soi-même que le Courrier des Stratèges prône (et pratique) depuis sa création : notre ambition, notre projet, n’est pas d’accumuler de l’audience à tout prix, tout particulièrement en transformant nos auditeurs (ou spectateurs) en hamsters qui tournent indéfiniment dans la même roue, par la reproduction infinie de contenus qui suscitent la colère sans proposition politique cohérente. Nous avons l’ambition de proposer des solutions pour sortir du déclin, voire de la décadence, française, au risque de perdre des lecteurs ou de heurter les avachis qui croient paresseusement que la France peut se révéler sans effort de leur part. Luttons contre l’avachissement ! Prenons-nous en main… La fin du parapluie nucléaire américain en donne l’occasion.

La « dissidence Lidl », c’est quoi ? Cinq ans après le début du confinement, il est bon de faire un point sur un effondrement cognitif et vital français. Que reste-t-il de ceux qui, il y a cinq ans, se sont dressés contre l’imposture sanitaire qui a initié une expérience mondiale d’enfermement volontaire des populations ?

Évidemment, d’un côté, on trouve des marchands de soupe qui tentent de capitaliser sur de l’audience facile, fondée sur une répétition inlassable des mêmes lieux communs, des mêmes prétendues révélations sur les « dessous » de la caste dont la presse subventionnée dissimule méticuleusement le début et la fin. Dans ce système qui casse les prix, dans cette logique Lidl, le bon ton consiste à multiplier les titres de plus en plus débilitants et grotesques (pas loin, désormais, de « la fin du monde est proche ») pour encadrer des informations d’une pauvreté navrante qui sont au principe actif d’un médicament ce qu’est la solution homéopathique. Combien, sous la plume de ces charlatans, d’informations insignifiantes sont un retraitement pour la deux centième fois, d’une micro-révélation sortie de son contexte, supposée nous démontrer des choses dont elles ne démontrent même pas le début d’une once ?

D’un autre côté, on trouve des Français avachis (aujourd’hui, 1 ou 2% de la population peut-être) qui se prêtent de bonne guerre à ce jeu pathétique : lisent-ils seulement les articles qu’ils likent et diffusent à tour de bras ? Je ne le pense pas, mais le titre de l’article annonce la fin du monde et l’Apocalypse (au sens vrai : le dévoilement de la vérité !), il n’est donc plus utile de le lire. Et d’ailleurs, la lecture de l’article rediffusé à l’infini par le dissident (ou la dissidente) est d’autant plus inutile que la mécanique du hamster dans sa roue en dispense : on sait par avance ce qu’on y trouvera !

Et ce contenu tient généralement en quelques slogans faciles : Macron est un voyou incompétent ou un homme de paille entre les mains de pédosatanistes qui boivent le sang des enfants (ne perdons plus de temps à faire de la politique et prions, c’est plus efficace contre Satan !), les ultra-libéraux ont pris le pouvoir, au nom des Rothschild, et les immigrés envoyés par Soros sont la cause de tous nos maux… La liste est variée, mais assez limitée au fond, suffisamment limitée pour que l’esprit distrait d’un avachi connaisse à peu près par coeur le contenu prévisible de l’homélie quotidienne qui lui est servie par les nouveaux prêtres de la secte.

C’est le secret de cette dissidence Lidl : dispenser de tout effort (c’est le principe même de l’avachissement : croire que l’on peut devenir lucide et intelligent sans peine). La révélation de la vérité reçue un soir de grâce dispense de toute autre remise en cause des certitudes acquises : je sais, je n’ai donc plus à douter, ni à m’interroger. Je détiens la vérité, et je peux expliquer avec haine à tous ceux qui me posent des questions imprévues qu’ils sont les agents du mondialisme.

Telle est la vérité du monde selon le dissident Lidl : il y a le bien d’un côté (tout ce que je crois, bien sûr) et le mal à combattre (tout ce que je ne crois pas).

Il y a un fléau aujourd’hui : tous les imposteurs qui prospèrent sur ces débilités simplistes (le monde est binaire et ressemble à une série Netflix) en calculant méticuleusement le nombre de vues qu’il faut réaliser pour atteindre le chiffre d’affaires du business model et les revenus escomptés. Et si le chiffre n’y est pas, on ressort une louche de gamins prétendument torturés dans des soirées animées par des magistrats de la République avec libations d’adrénochrome, de fêtes entre parlementaires payées par le contribuable, de subventions à des hôpitaux en Afrique qui n’existent pas, de célébrations du diable autour d’une vasque où se consume le corps d’un hétérosexuel blond aux yeux bleus de plus de cinquante ans discrètement enlevé dans un pays improbable et sacrifié sur l’autel des croyances woke.

Pourquoi sommes-nous là ?

Bien entendu, le Courrier pourrait gagner de l’argent facilement, et sans demander d’abonnement, en servant la même soupe glauque qui exploite la paresse de certains avachis. Comme beaucoup nous l’ont suggéré avec acrimonie à l’époque, nous pourrions titrer en une chaque jour sur le COVID, les escroqueries de von der Leyen durant le COVID, les états d’âme de Didier Raoult ou de Christian Peronne. Nous pourrions parler indéfiniment de pédo-satanisme, de Brigitte Macron est un homme, et d’autres modes qui rapportent de l’audience en tirant tout le monde vers le bas.

Le problème tient au fait que nous n’aimons pas cette facilité, que nous aimons l’exigence, et que l’argent n’est pas tout dans la vie. Il y a d’autres valeurs : la dignité, l’humanité, le devoir moral. Nous pourrions être des Pharisiens, des imposteurs, exploiter la bassesse de certains de nos contemporains en nous parant de vertus que nous n’avons pas et en servant une soupe surgelée passée au micro-ondes pour satisfaire les appétits les plus bas.

Malheureusement, nous ne sommes que ce que nous sommes :

  • le mensonge a peu d’intérêt
  • la société ne s’améliorera que dans la responsabilité individuelle : chacun doit se prendre en main, sans s’inventer des vies qu’il n’a pas (répétons-le : être dissident, ce n’est pas passer trois ou quatre par jour sur Youtube pour liker les vedettes qu’on aime… les efforts à fournir pour résister sont bien plus lourds)
  • l’essentiel est de comprendre la complexité du monde, et non la simplifier
  • il n’est de progrès individuel que dans le doute
  • maintenir nos contemporains dans l’avachissement nous choque

Et surtout, par-dessus tout ! ce n’est pas la vérité qui fait progresser, c’est l’erreur ! Comme disait Karl Popper, pour qui une vérité dont on ne puvait jamais prouver la fausseté n’avait aucune valeur scientifique.