Sécession sociale : comment Cathy s’est libérée de la sécu pour moins de 400€ par mois

Sécession sociale : comment Cathy s’est libérée de la sécu pour moins de 400€ par mois


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Jusqu'ici, le Courrier a très peu parlé des "libérés de la sécu", mouvement qui a connu ses heures de gloire à l'époque où le RSI dysfonctionnait fortement, avant son remplacement par le SSI (dont personne ne sait s'il fonctionne vraiment mieux que son ancêtre, mais il a en tout cas le mérite de moins faire parler de lui...). Mais que sont devenus les "libérés" qui ont renoncé à payer leurs cotisations URSSAF pour adhérer à un régime maladie étranger ? Je suis allé à Nantes pour rencontrer Cathy. Elle nous raconte son expérience de sécession sociale radicale.

Quand on sort une interview de « libéré » de la Sécu, il faut toujours prendre ses précautions… et donc je les prends. Rappelons, une fois de plus, qu’appeler à ne pas payer ses cotisations de sécurité sociale est un délit : donc, il faut payer ses cotisations de sécurité sociale, même si rien ne vous oblige à faire de l’excès de zèle en payant au-delà de ce que vous devez.

Précisément, depuis la création du RSI en 2005 , par les ministres Dutreil et Bas (LE Philippe Bas actuellement sénateur), de nombreux travailleurs indépendants ont fui la sécurité sociale : non seulement, ils étaient sommés de payer des sommes parfois farfelues, dans tous les cas confiscatoires, mais, en contrepartie, ils n’ouvraient guère d’accès à la moindre prestation sérieuse. C’était tout particulièrement vraie pour les femmes pendant leur congé maternité, qui, parce qu’elles étaient indépendantes, subissaient une discrimination implacable par rapport aux salariées, non sur les cotisations, mais sur les indemnités journalières !

Curieusement, aucun mouvement féministe, aucun syndicat bien-pensant ne s’est jamais offusqué de savoir l’avocate ou la femme du boulanger si mal traitée par rapport à ses consoeurs employées du cabinet ou vendeuse salariée de la boulangerie. Et, dans les considérations si fréquentes sur les employeurs parés de tous les maux, on entend rarement d’allusion à ces discriminations.

Bref, face au coût exorbitant d’une protection sociale obligatoire mais indigente, plusieurs milliers, peut-être plusieurs dizaines de milliers (les statistiques officielles sur ce sujet sont floues) de travailleurs indépendants ont fait le choix de quitter le RSI pour adhérer à un régime de remplacement. C’est le cas de Cathy, qui nous explique son parcours.

Peser le pour et le contre

Je n’ignore que beaucoup de libérés soutiennent que le monopole de la sécurité sociale est illégal. C’est conviction n’est pas nouvelle et fut largement diffusée par des gens comme Claude Reichman à l’époque.

Je ne puis ici que répéter ma conviction inverse : un Etat membre de l’Union est fondé à imposer un système de solidarité monopolistique, selon certaines limites de proportionnalité. J’ai toujours pensé que le combat contre le monopole était perdu juridiquement, mais qu’il était gagnable sur les limites à lui poser.

Mais… c’est une autre affaire. Toujours est-il que Cathy a fait le choix courageux de faire sa sécession en quittant la sécurité sociale. Il faut oser… et elle mérite d’être saluée pour ce courage.

Economiquement, cette stratégie est gagnante dans un premier temps : alors que ses cotisations de sécurité sociale représentaient la moitié de ses revenus lorsqu’elle était au RSI, son contrat avec un assureur anglais lui a coûté moins de 5.000 € par an… complémentaire santé comprise.

Dans un second temps, cette stratégie est une ruine : attaquée en justice, Cathy a dû s’adjoindre les services d’un avocat (dans ce cas, je crois qu’elle a cédé à la tentation si répandue de prendre un « grand nom » qui lui a coûté une blinde et n’a même pas assisté à l’audience, mais je parle sous son contrôle), et elle encourt désormais une condamnation à payer des arriérés à hauteur de 200.000€ environ. Comme elle est insolvable, la sécurité sociale peine à récupérer cette somme… mais c’est un contentieux long qui complique un peu la vie.

Néanmoins, ce choix lui a permis d’améliorer son niveau de vie sans baisser sa couverture santé.

Je livre évidemment cet exemple à la sagacité de chacun. Cathy a fait sécession socialement, selon une voie que nous ne recommandons pas, et selon un processus que je trouve mal préparé. La sécession sociale peut se passer légalement, mais elle suppose une préparation minutieuse.

Dans tous les cas, ce combat ouvre la voie à une réflexion indispensable sur le coût exorbitant et confiscatoire de la protection sociale obligatoire et monopolistique en France.


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