La requête d'enquête de deux députés suisses sur des cadeaux luxueux (lingot d'or et montre Rolex) offerts à Donald Trump par des patrons expose la nature des échanges internationaux. La baisse des droits de douane suisses, obtenue peu après, soulève une question fondamentale : la négociation est-elle devenue un simple marché où l'influence s'achète au grand jour ?

La scène, presque surréaliste, a fait le tour des médias : un lingot d’or d’un kilo et une horloge Rolex trônant sur le bureau de Donald Trump à la Maison-Blanche. Selon plusieurs sources, ces présents auraient été offerts par des patrons suisses venus plaider la réduction des droits de douane américains, portés depuis août 2025 à 39 % sur une série de produits helvétiques. Deux députés suisses, Greta Gysin et Raphaël Mahaim, ont saisi le procureur général pour demander l’ouverture d’une enquête. Une question simple guide leur démarche : s’agit-il de diplomatie… ou de corruption institutionnalisée ?
Une « diplomatique du lingot d’or » selon la presse américaine
Au début du mois de novembre, des chefs d’entreprises helvétiques ont fait le déplacement pour Washington. Au cours de leur visite, ils ont rencontré le président américain dans le but de négocier sur les droits de douane de 39% appliqués aux produits en provenant de Suisse.
Les jours suivants, une horloge de table de marque Rolex et un lingot d’or personnalisé ont décoré le bureau de Trump. Ces articles de décoration hors prix ont immédiatement attiré l’attention des médias américains et suisses. Selon l’AFP et la Radio télévision suisse (RTS), ce sont des cadeaux offerts par les chefs d’entreprise helvétiques.
Dix jours plus tard, Washington et Berne ont annoncé la baisse des droits de douanes aux produits helvétiques à 15%. Cette nouvelle accueillie avec joie par les organisations patronales en Suisse a suscité une vive polémique. La presse américaine a alors employé l’expression « la diplomatie du lingot d’or ».
Les députés suisses Greta Gysin et Raphaël Mahaim membres du Parti écologiste VERT-E-S ont alors saisi la justice pour l’ouverture d’une enquête sur ces fameux « cadeaux offerts » à Donald Trump.
Des députés suisses alertent sur un risque de corruption
Pour Gysin et Mahaim, l’affaire n’a rien d’anodin. Dans une lettre adressée au procureur général, les deux élus évoquent un risque d’« avantage indu » au sens de l’article 322 du Code pénal suisse, relatif à la corruption d’agents publics étrangers.
Ils soulignent également le manque total de transparence quant à la destination finale des cadeaux : ont-ils été enregistrés ? Sont-ils devenus propriété personnelle du président ? Ont-ils servi d’outil de négociation ?

Ces zones d’ombre menacent, selon eux, « la crédibilité de nos institutions » et l’image internationale d’un pays qui se targue d’une rigueur éthique exemplaire.
Les députés suisses qui réclament une enquête pointent du doigt un symptôme sans s'attaquer à la cause profonde : le pouvoir excessif conféré aux dirigeants politiques en matière commerciale.
Vers un marché des influences institutionnalisé
L'électorat de Trump semble indifférent à ces pratiques, peut-être parce qu'il perçoit instinctivement que tous les politiciens monnaient leur influence, certains simplement avec plus de discrétion. Trump assume ouvertement ce que d'autres dissimulent sous le vernis des protocoles diplomatiques. Le danger est que cette normalisation du marchandage politique crée un précédent où les relations internationales ne seront plus régies par des principes, mais par la loi du plus offrant.
Quand la Suisse obtient une réduction de 24 points de pourcentage sur ses droits de douane après une rencontre et des cadeaux, quel message cela envoie-t-il aux autres nations ? Que l'accès au marché américain ne se négocie plus à la table des discussions commerciales, mais dans le bureau ovale, contre des symboles de richesse et des flatteries.Les autres nations en tirent la leçon : si vous voulez conclure un accord, vous devez littéralement satisfaire l'homme au sommet.
La solution libertarienne est radicale mais simple : retirer aux politiciens le pouvoir de manipuler le commerce. Seul un marché véritablement libre peut assainir les relations internationales en éliminant les occasions de corruption structurelle.



