L' Assemblée nationale a voté à l'unanimité la revalorisation des indemnités des élus locaux. Officiellement pour renforcer l'engagement, cette mesure, couplée à des avantages retraite et une prime "régalienne", soulève des interrogations sur la gestion des deniers publics et un clientélisme potentiel.

La proposition de loi créant un statut de l'élu local a franchi une étape décisive, l'Assemblée nationale ayant adopté en deuxième lecture la hausse des indemnités des maires et de leurs adjoints. Présentée comme essentielle pour améliorer les conditions d'exercice du mandat, faciliter l'engagement dans les petites communes et sécuriser la fin de carrière, cette mesure est chiffrée entre 50 et 55 millions d'euros. Si l'intention affichée est louable – soutenir l'engagement citoyen –, l'approche choisie, mêlant revalorisations salariales et avantages sociaux, mérite une analyse critique sous l'angle de la responsabilité budgétaire et de la transparence.

Une hausse ciblée sur les petites communes
La mesure phare concerne les maires et adjoints des communes de petite et moyenne taille. Pour celles de 10 000 à 20 000 habitants, l'augmentation atteint environ 4 %, tandis que les villages de moins de 500 âmes voient leurs indemnités grimper de 10 %.
Ces revalorisations, estimées à un coût global de 50 à 55 millions d'euros, seront financées via le projet de loi de finances (PLF) 2026, en discussion au Sénat. Les collectivités locales auront la latitude d'appliquer ces nouveaux taux sans délai, en anticipation des élections municipales.

Pourquoi imposer une charge supplémentaire aux budgets locaux, déjà contraints par les transferts de compétences de l'État ? Au lieu de promouvoir une décentralisation réelle, où les citoyens pourraient choisir librement leurs niveaux de taxation, cette loi centralise les décisions et favorise une caste d'élus professionnels, dépendants des subventions publiques plutôt que de l'initiative locale.
La fameuse « prime Lecornu » : absente du texte… mais glissée dans le budget
Évoquée lors du Congrès des maires, la prime annuelle de 500 euros pour chaque maire, présentée comme une compensation pour leurs fonctions « d’agent de l’État », ne figure pas dans la proposition de loi.
Mais elle réapparaît opportunément dans le projet de loi de finances actuellement au Sénat. Une manière de contourner les débats et de faire adopter, par la porte budgétaire, un avantage supplémentaire.

Le gouvernement souhaite une mise en application rapide, clairement en lien avec les élections municipales qui approchent.
Signe intéressant : les collectivités pourront appliquer les hausses dès maintenant, même si le financement n’est pas encore stabilisé. Une avance qui interroge sur le sérieux budgétaire de l’État… mais surtout sur ses priorités.
Une adoption unanime qui interroge
Adoptée à l'unanimité en deuxième lecture, cette loi était attendue par les élus locaux pour améliorer leurs conditions d'exercice. Pourtant, cette unanimité masque un consensus élitiste : députés et sénateurs, issus du même moule, protègent leurs pairs sans débat sur l'efficacité ou l'équité.
Le gouvernement pousse pour une application rapide, arguant de la proximité des municipales, mais cela soulève des doutes sur des motivations électoralistes.
La création d'un statut de l'élu local est un sujet légitime, mais la manière de le mettre en œuvre est éloignée des principes de saine gestion et de l'équité.
Sous le prétexte d'améliorer l'attractivité du mandat, les parlementaires ont voté un texte qui ressemble à une distribution de fonds publics assortie de privilèges.



