A-t-on vraiment besoin d’une loi pour rétablir les comptes de la sécurité sociale ?

A-t-on vraiment besoin d’une loi pour rétablir les comptes de la sécurité sociale ?


Partager cet article

C’est devenu une banalité : les comptes de la sécurité sociale en France sont gravement déficitaires (de l’ordre de 20 milliards en 2025 soit l’équivalent du budget des universités). Les Français consomment beaucoup trop de prestations sociales à crédit, qui plus est de manière obligatoire et monopolistique. Tout se passe comme si la caste qui ordonnance ce système voulait absolument nous emmener collectivement à la ruine. Mais avons-nous besoin d’une loi pour sortir de cette spirale ? Sinon comment faire ?

Je commence évidemment cet article technique et un tantinet indigeste en cette période de fêtes, par rappeler la série d’articles que j’ai produite sur l’inconstitutionnalité de la loi spéciale qui permet au gouvernement et à la caste politique qui le soutient (même si elle cherche à faire croire le contraire), de faire passer de façon autoritaire des mesures budgétaires qui nous ruinent méthodiquement, tout cela au nom de la « continuité de la vie nationale ». Comme les représentants du peuple ont été incapables de voter des lois pour assurer les recettes et les dépenses en 2025, on les fait finalement passer sans débat… et en violant consciencieusement la Constitution.

J’en profite pour vous rappeler l’adresse du fil Telegram (gratuit) où vous pouvez suivre l’actualité de l’action que nous préparons : https://t.me/RacketFiscal. Si vous voulez nous rejoindre, nous aider, il vous suffit de cliquer sur cette adresse pour le faire.

Revenir à l’équilibre de la sécurité sociale, est-ce compliqué ?

Dans le fatras d’informations à la fois complexes et outrancièrement simplifiées qui nous est délivré tous les jours, il existe un fil rouge : ce serait redoutablement difficile de revenir à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. Il faudrait adopter des lois tortueuses, avec des majorités inatteignables, et il faudrait des débats interminables à l’Assemblée Nationale pour y parvenir.

Cette impression, largement entretenue par la caste pour justifier son immobilisme et sa passivité, est pourtant tout sauf vraie. Dans la pratique, le retour à l’équilibre des comptes peut tout à fait se passer de loi, et d’ailleurs… il ne peut probablement pas passer par la loi.

Pour bien comprendre ces propositions que certains jugeront provocatrices, il suffit d’avoir en tête deux points essentiels :

1 – la loi de financement de la sécurité sociale ne fixe pas les recettes et les dépenses de la sécurité sociale, mais seulement les objectifs de recettes et de dépenses. C’est une différence fondamentale avec la loi de finances de l’Etat.

Dans le cas ce la loi de finances de l’Etat (en principe, évidemment, on ne parle pas ici des dérives importantes de la période actuelle), lorsque les crédits votés sont consommés, on ferme le robinet. C’est la fameuse blague des administrations qui arrêtent de payer leurs factures de téléphone fin octobre parce que l’argent manque, et qui font de la cavalerie permanente avec Orange : quand il n’y a plus d’argent, on arrête les frais.

Dans le cas de la sécurité sociale, personne n’imagine un monde où, fin octobre, on arrêterait d’opérer les cancers faute d’argent (là encore, je parle des principes, car des dérives de plus en plus fréquentes conduisent à des renoncements arbitraires de soigner). La loi fixe donc des objectifs, mais ceux-ci ne sont pas contraignants comme pour les comptes de l’Etat.

Dans la pratique, cette différence tient au fait que la sécurité sociale n’est pas financée par des impôts qui financent des dépenses publiques. Comme le répète souvent le Conseil Constitutionnel, la sécurité sociale est financée par des contributions qui servent à garantir des prestations aux cotisants. C’est le principe du système dit « contributif ». Dès lors qu’un assuré a régulièrement payé ses prestations, l’existence d’un déficit global ne peut empêcher la délivrance des prestations.

2 – l’Etat peut décider par voie réglementaire de modifier les dépenses de la sécurité sociale

Si la loi de financement de la sécurité sociale ne peut empêcher les déficits, en revanche, l’Etat et l’administration en ont la faculté : le Conseil Constitutionnel lui-même a posé ce principe de façon constante.

D’une part, le Conseil Constitutionnel a toujours considéré que la fixation des taux de prélèvements ne relevait pas de la loi mais du règlement.

On retrouvera par exemple dans la décision n°2008-571 DC du 11 décembre 2008 ce point fondamental, au considérant n°7 :

Traduction : la loi de financement de la sécurité sociale est un passage obligé pour fixer les principes fondamentaux de la sécurité sociale, notamment les catégories de personnes assujetties. En revanche, le « taux de la part qui incombe » à chacun relève d’une décision ministérielle. Pour lutter contre le déficit, le gouvernement peut donc simplement décider d’augmenter les cotisations par décret…

S’agissant des dépenses, la mécanique est la même. Le Conseil Constitutionnel l’a expressément dit dans sa décision 2012-659 DC (considérant 68):

Là encore, le Conseil est très clair : « l’État peut (…) modifier les tarifs des prestations (…) de manière à concourir au respect de l’objectif » d’équilibre des comptes. Cette décision suppose quelques consultations, mais elle ne nécessite pas le passage par la loi.

Autrement dit, le retour de nos comptes sociaux à l’équilibre ne suppose guère de loi invotable. Il suppose seulement un courage politique, un courage gouvernemental. Il est vrai qu’il s’agit là d’une vertu oubliée. Mais elle est en tout cas tout à fait à notre portée.


Partager cet article
Commentaires

S'abonner au Courrier des Stratèges

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter pour ne rien manquer de l'actualité.

Abonnement en cours...
You've been subscribed!
Quelque chose s'est mal passé
Recours judiciaires contre les autorités pour les dommages des vaccins COVID : focus sur les Pays-Bas et panorama Europe
Photo by Mathurin NAPOLY / matnapo / Unsplash

Recours judiciaires contre les autorités pour les dommages des vaccins COVID : focus sur les Pays-Bas et panorama Europe

Dans un contexte où la pandémie de COVID-19 continue de susciter des débats passionnés sur la sécurité des vaccins ARNm, une affaire judiciaire aux Pays-Bas fait couler beaucoup d'encre. Depuis juillet 2023, sept citoyens néerlandais, se présentant comme victimes de dommages graves (physiques et mentaux) suite à leur vaccination, ont intenté une action civile devant le tribunal de district de Leeuwarden contre 17 entités et personnalités influentes. Parmi les accusés : Bill GATES (via sa fondat


Isabelle Hock

Isabelle Hock

Citoyens ! le train de la censure macroniste entre en gare !

Citoyens ! le train de la censure macroniste entre en gare !

La macronie ne rate jamais une occasion de se draper dans les grands principes pour mieux les piétiner. La dernière trouvaille sortie du chapeau de la technostructure, en marge du Forum de Paris sur la Paix ce 29 octobre 2025, s'intitule pompeusement : "Déclaration de Paris sur l’action multilatérale pour l’intégrité de l’information". Un titre qui fleure bon la démocratie, le pluralisme et la lutte contre les méchants désinformateurs. Pourtant, quiconque connaît le principe élémentaire de


Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Permis européen : comment Bruxelles prépare le flicage des automobilistes

Permis européen : comment Bruxelles prépare le flicage des automobilistes

Sous prétexte de l'objectif “zéro mort sur les routes d’ici 2050”, le Parlement européen a adopté sa réforme du permis de conduire. Sous prétexte de sécurité routière, Bruxelles instaure un contrôle médical périodique et un permis numérique, un modèle de contrôle numérique permanent des conducteurs européens. Le 21 octobre 2025, l'Europe a déclaré la guerre aux automobilistes. Sous la bannière trompeuse du « zéro mort » pour 2050, Bruxelles déploie son arsenal réglementaire. La fin du permis de


Rédaction

Rédaction

Une nouvelle course à l'armement ? par Elise Rochefort

Une nouvelle course à l'armement ? par Elise Rochefort

L'analyse du paysage géostratégique mondial, en cette fin d'année 2025, révèle une intensification marquée de la compétition militaire entre les grandes puissances. Cette dynamique, caractérisée par une hausse record des dépenses d'armement, une modernisation accélérée des arsenaux, notamment nucléaires, et l'érosion rapide des cadres de régulation, confirme l'entrée dans une nouvelle ère de confrontation. Voici une analyse détaillée de cette nouvelle course à l'armement. 1. Dans quelle m


Rédaction

Rédaction