Une fois de plus le gouvernement avance masqué: la vie culturelle ne reprendra pas avant l’automne – au plus tôt!

Une fois de plus le gouvernement avance masqué: la vie culturelle ne reprendra pas avant l’automne – au plus tôt!


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Après des mois de fermeture, les lieux culturels croyaient voir enfin le bout du tunnel. Si la réouverture est prévue à partir du 19 mai, il faudra composer avec le couvre-feu, les jauges et surtout une invraisemblable complication organisationnelle. Pour faire bref: les salles réouvriront complètement quand la saison sera finie.

Il y a quelques semaines une mission du Sénat avait préconisé la réouverture des lieux culturels en adaptant les protocoles sanitaires en fonction des particularités de chaque salle. Emmanuel Macron n’a pas repris dans son intervention cette hypothèse.

Concrètement, la réouverture des lieux culturels se passera donc en trois phases.

À partir du 19 mai, les cinémas, théâtres, salles de spectacle et musées pourront accueillir du public. Le couvre-feu est repoussé à 21 heures mais la reprise est conditionnée au respect des jauges et des protocoles.

Le 9 juin, les salles pourront accueillir jusqu’à 5 000 personnes avec un passe sanitaire. Le couvre-feu, lui, est repoussé à 23 heures.

La vraie réouverture aura lieu à priori le 30 juin avec une levée des jauges et du couvre-feu. Il est pourtant précisé que des restrictions pourraient intervenir en fonction des chiffres de l’épidémie dans les départements.

Autrement dit l’ouverture des salles sera autorisée lorsque la saison théâtrale s’achève !

Le secteur culturel, échaudé par des promesses culturelles non suivies d'effet, considèrent ces annonces avec méfiance

Le gouvernement prévoit une réouverture en trois phases, avec une évolution des jauges.

Au départ, les salles ne pourraient accueillir que 35% du public, puis 65% au bout d’un mois puis 100%.

Mais les chiffres en pourcentage ne veulent pas tout dire. Il y a une grande différence entre un cinéma dont le point d’équilibre charges/recettes est à 17% des places vendues et un théâtre pour lequel il faut remplir 38% de la salle.

Par ailleurs si ce gouvernement avait conduit une réelle concertation il aurait dû aller bien au-delà de la question des jauges. Il y a aussi l’enjeu des systèmes de ventilation des salles, la possibilité ou pas des entractes. Autant de critères qui devront être élaborés avec le ministère de la Santé dont on connait la réactivité dans la gestion de crise.

Par ailleurs le gouvernement reste silencieux sur les compensations financières que recevront les salles pour leurs jauges réduites ou leurs investissements destinés à adapter les conditions d’accueil des publics.

On est donc encore loin d’une réouverture mi-mai avec l’ensemble des salles de spectacle.

Mais le pire c’est le choix de calendrier : la mi-mai, c’est déjà la fin de saison des salles de spectacle. Autant dire que cela risque d’être très complexe de mettre en œuvre un protocole sanitaire pour quelques semaines avant l’été. Un grand nombre de salles pourraient donc privilégier une ouverture à la rentrée, fin août ou début septembre.

Après une si longue période sans culture, quelle sera l'attitude des Français?

Finis les longs mois d’attente : théâtres, cinémas et musées pourront enfin rouvrir en partie le 19 mai.

Mais les Français sont-ils d’avance découragés par l’instauration de jauges et la mise en place, qui n’est pas encore confirmée, d’un protocole de gestion des flux, du port du masque, ou encore de l’obligation d’un passeport sanitaire ? Aucune de ces mesures ne fait l’objet de blocage auprès des personnes interrogées. Étrangement, la possibilité d’un passeport vaccinal est même mieux accueillie que l’obligation de porter le masque, un chiffre probablement lié à la légère surreprésentation des personnes de 61 ans ou plus parmi les sondés.

Premier constat, les Français semblent attendre avec impatience la réouverture des lieux culturels, en particulier les cinémas, suivis de près par les théâtres et les musées. Ainsi, 64% des sondés affirment-ils vouloir retourner dans les salles obscures dès leur réouverture, un chiffre qui s’élève à 57% pour les théâtres et 56% pour les musées ; 31,5% expliquent malgré tout avoir encore des réserves et se sentir « pas complètement prêts », tandis que 1,7% des utilisateurs se disent encore trop préoccupés par la situation sanitaire pour se projeter. Enfin, 1,5% d’entre eux pensent qu’il est « bien trop tôt » pour y réfléchir.

C’est bien la question du passeport vaccinal qui fait le plus débat parmi toutes les mesures sanitaires possibles. Au total, seules 35% des personnes interrogées sont d’avis qu’un passeport vaccinal serait nécessaire pour une réouverture en sécurité des lieux culturels. Un chiffre qui grimpe à 56,8% lorsqu’on ne s’intéresse qu’aux personnes âgées de 61 ans ou plus. Le passeport vaccinal agirait à l’inverse comme un blocage pour les 18-25 ans, qui préféreraient alors renoncer aux activités culturelles. Un résultat qui semble encore une fois logique, étant donné que les plus jeunes n’auront a priori accès à la vaccination que courant juin.

Les festivals, en revanche, rencontrent moins de succès, selon cette étude : seuls 28% disent vouloir s’y rendre dès que possible, tandis que la même proportion de sondés souhaite attendre la fin de la crise. Une mauvaise nouvelle pour les organisateurs de festivals, qui se battent depuis des mois pour préserver leurs éditions cette année. Et alors même que ces événements se déroulent, pour la plupart, en plein air.

Enfin, si la vie culturelle semble bien avoir manqué aux Français, les sondés ont déclaré vouloir maintenir les mêmes dépenses octroyées à la culture, mieux 24,1% d’entre eux songent à l’augmenter. Une proportion qui monte à 30% pour les moins de 40 ans !

Les festivals de l'été auront-ils lieu?

En fait, le but du gouvernement est surtout que les festivals puissent avoir lieu. Avec pour l’instant une jauge de 5000 personnes assises et masquées.

Selon l’avis du Sénat la jauge de 5 000 personnes retenue par le gouvernement pour interdire les grands rassemblements apparaît arbitraire et ne repose sur aucun fondement scientifique et ces conditions compromettent l’organisation d’un certain nombre de festivals, notamment dans le domaine des musiques actuelles. Les Eurockéennes de Belfort, qui devaient se tenir début juillet, viennent d’annoncer leur annulation pour la deuxième année consécutive. Estimant probants les concerts tests debout réalisés à l’étranger, ils poussent pour une accélération de leur organisation en France.

C’est bien là toute la difficulté de cette réouverture, avec un cadre sanitaire contraignant : elle risque aussi de creuser l’écart entre les genres artistiques, entre les établissement publics et privés.

Sur le fond 2021 ressemble hélas assez tristement à 2020. La persistance des incertitudes liées à la politique du « stop and go » gouvernemental, a fini par faire plier certains enthousiasmes.

La programmation estivale théorique : beaucoup d’annulations

Voici pour guider votre programmation estivale un état des lieux des évènements maintenus et annulés. Cette liste n’est pas exhaustive et est évolutive. Vos apports seront les bienvenus.

Festival de Beauregard : annulé

Festival de Musilac : annulé

Festival d’Aix en Provence: maintenu. Du 30 juin au 25 juillet.

Festival d’Avignon : maintenu. Du 5 au 25 juillet.

Festival de Cannes : maintenu. Du 6 au 17 juillet.

Festival international de la bande dessinée (juin), Angoulême : annulé.

Hellfest (juin), Clisson : annulé.

La Roque d’Anthéron : maintenu. Du 23 juillet au 18 août.

Les Eurockéennes (juillet), Belfort : annulé.

Les Francofolies, La Rochelle : maintenu. Du 10 au 14 juillet.

Les vieilles charrues, Karaez : maintenu. Du 8 au 18 juillet.

Marseille Jazz des Cinq Continents : maintenu. Du 8 au 25 juillet.

Montpellier Danse : maintenu. Du 23 juin au 16 juillet.

Printemps de Bourges (mai) : décalé. Du 22 au 27 juin.

Grosse inquiétude et plusieurs scénarios

Plusieurs scénarios sont toujours envisagés, essentiellement l’annulation globale, mais aussi l’organisation d’autres événements à jauges plus réduites et selon les normes sanitaires d’application au moment concerné, événements qui ne seraient sans doute plus vraiment des festivals proprement dits.

On peut toujours espérer que la vaccination permette d’autres choses, peut-être vers septembre-octobre, mais dans la norme actuelle, tous les directeurs commencent à être très pessimistes, car ce n’est pas si facile de prendre la décision d’annuler ou simplement de décaler. Il ne faut pas oublier qu’on a un calendrier de festivals qui se s’organise globalement, les gens n’organisent pas tel ou tel week-end par hasard. Si tout le monde se mettait à reporter vers septembre-octobre, il y aurait aussi un risque de concurrence totalement accru, sans même parler des questions logistiques ou de météo.

Le gouvernement considère-t-il à nouveau la culture comme une activité essentielle?

Il est urgent de revoir la façon de valoriser un secteur pourvoyeur d’emplois et surtout pourvoyeur de sens pour les gens.

Cela devrait-être un enjeu fondamental pour le gouvernement.

Boulot-dodo-enfants, ça ne marche pas. À un moment donné, on doit avoir une vie sociale et on doit avoir quelque chose qui nous raccroche à plus grand que nous.

Une civilisation sans culture, juste avec du business, ça n’a aucun sens. Il est peut-être temps qu’on remette ça au centre du débat. Après un an de « culture non essentielle », c’est flagrant qu’il manque quelque chose à nos vies.


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