Raide, statique, trop maquillé et parlant d'une voix inhabituellement monotone, Emmanuel Macron a livré le 9 novembre au soir une allocution inspide. Tout se passe comme si le Président de la République était sur le point de voir éclater la "bulle Macron" qui s'était constituée en 2017. La question est de savoir quand et comment cette bulle va éclater: par une dégringolade dans les sondages? Par un renoncement à une nouvelle candidature?
C’est un spectacle étrange que nous a proposé Emmanuel au soir du 9 novembre 2021. Tout au long de la journée, il s’était murmuré dans Paris qu’il avait fait exprès de placer son intervention en ce jour anniversaire de la mort du Général de Gaulle pour empêcher Eric Zemmour de profiter de la date pour annoncer sa candidature. Vraie ou pas, cette histoire fait ressortir, par contraste, l’absence totale de relief de l’intervention du chef de l’Etat.
Ce n’est pas seulement la voix affaiblie du Chef de l’Etat – avec cette dernière partie étrange où le son mal réglé de la régie de l’Elysée lui donnait des intonations à la Darth Vador. C’est l’ensemble de sa prestation qui a donné à penser que la « bulle Macron » pourrait bien éclater avant même qu’il annonce sa candidature.
La guerre est finie: en fait elle n'a sans doute jamais eu lieu
Rappelons les faits: le 12 juillet dernier, le président de la République engageait le pays dans un chantage à la vaccination: il rendait cette dernière obligatoire pour quelques professions (professions de santé, pompiers etc…) et il mettait en place un pass sanitaire obligatoire pour un certain nombre de lieux publics, à commencer par les restaurants, les gares, les aéroports. Hier soir, le président n’a pas remercié les Français qui se sont fait vacciner; il a annoncé la nécessité d’une troisième dose pour les plus âgés des Français. Et il a appelé au « sens de la responsabilité » des « six millions de non-vaccinés », tout en ayant affirmé que le vaccin ne fonctionnait pas plus de six mois puisqu’il faut des rappels. De même le Président a fait l’éloge des soignants et s’est félicité d’une augmentation sur leur fiche de paie; tout en oubliant qu’un certain nombre de soignants ont été suspendus et privés de traitements.
Du coup, l’invocation de la « cinquième vague » avait un aspect étrange. Le Président a beau s’accorder un satisfecit pour la gestion de la pandémie, on était finalement loin du martial « Nous sommes en guerre » du printemps 2020. Dix-huit mois plus tard, le Président de la République apparaissait singulièrement raide, statique et artificiellement peu démonstratif, comme s’il avait décidé de jouer un rôle, celui d’un homme posé, bien loin du personnage provocateur défiant tous ses adversaires, qu’il a pu être, au début de l’affaire Benalla ou lors de la crise des Gilets Jaunes. Le problème vient de ce que cet Emmanuel Macron, inhabituellement calme, apparaît singulièrement fade.
La bulle "Emmanuel Macron" sur le point d'éclater?
En fait, Emmanuel Macron sécrétait hier une atmosphère aseptisée. Et sa présentation de la situation était elle-même aseptisée. Il a commencé par mentionner les angoisses des Français et il a fini en les évoquant à nouveau. Entre les deux, nous avons eu une série de distorsions de la réalité, outre la crise sanitaire déjà évoquée: le Président a parlé de maîtrise de la dépense publique alors que jamais le taux d’endettement du pays n’a été aussi élevé; Il s’est vanté d’un chômage des jeunes à des niveaux historiquement bas en oubliant la détresse beaucoup plus générale de la jeunesse, par exemple privée de cours en présence à l’université pendant des mois. Le Président a annoncé, comme s’il ne s’agissait pas d’un tête-à-queue, de fabriquer de nouveaux réacteurs nucléaires. Il a parlé de l’Union Européenne comme s’il s’agissait de la solution pour l’avenir alors que les Français constatent que l’UE est en crise etc….Surtout, il définitivement renoncé à toute « réforme des retraites ».
L’audimat nous dit que seulement 19 millions de Français ont regardé le Président quand ils étaient 37 millions en avril 2020, 30 millions le 31 mars de cette année et 22 millions le 12 juillet dernier. Mais est-ce étonnant quand le Président ne parle pas du pays tel qu’il est, tel qu’il souffre et craint l’avenir, mais du pays comme il voudrait le voir. Pas un mot sur l’immigration ! Et quand il parle de l’insécurité, il dévie immédiatement vers la violence contre les femmes ou contre les enfants – deux réalités, bien entendu – au lieu de traiter la question de l’insécurité urbaine et de l’ensauvagement de la jeunesse.
Tout se passe comme si la bulle « Emmanuel Macron était sur le point d’éclater. Comment se manifestera-t-elle? Par un décrochage spectaculaire dans les sondages? Par une annonce non moins inattendue de non-candidature?