Macron promet de raser gratis avec l’argent de l’Allemagne


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Dans son allocution hyper-annoncée par les médias, Emmanuel Macron a promis de façon floue qu’il raserait gratis dans les mois à venir. L’Europe paiera ! autant dire, l’Allemagne, c’est là qu’on a vraiment un gros doute…

Il y en avait pour tout le monde dans l’allocution d’Emmanuel Macron ce soir. Pour les soignants, qui seront augmentés. Pour les Noirs et les Arabes, qui seront mieux protégés contre les discriminations. Pour les salariés qui seront mieux protégés. Pour les patrons, qui seront au coeur de la reprise. Pour les policiers et les gendarmes, sans qui la République n’existerait. Pour les écologistes, qui auront droit à une reprise verte. Pour les admirateurs de l’État, qui vont voir l’investissement public en action. Pour les élus locaux, qui auront plus de pouvoir demain. C’est cool !

Macron n’augmentera pas les impôts

L’annonce essentielle du discours, qui était plus qu’une promesse qu’une annonce, consistait à dire que a relance ne sera pas financée par l’impôt. Les impôts n’augmenteront pas, promet Emmanuel Macron ! Et d’abord parce qu’ils sont déjà très élevées. La dette sera donc financée par la reprise économique…

À ce stade, cela ne mange évidemment pas de pain de le dire, et personne ne le croit vraiment. Nous avons déjà évoqué les propositions, en boucle, d’imposer l’épargne et l’assurance-vie. Nous avons aussi évoqué les projets divers qui voient le jour, notamment dans l’assurance.

Mais l’intention est là, qui cache à peine la façon dont les dettes astronomiques qui se creusent de jour en jour, notamment du fait du chômage partiel, seront remboursées. Macron mise en effet tout, désormais, sur l’Europe, nous y reviendrons.

D’ici là, le Président se désangoisse (on a la psychanalyse qu’on peut) en expliquant que l’argent va couler à flot pour sauver le paquebot France. C’est à peine s’il esquisse l’idée qu’il faudra quand même travailler plus et produire plus pour éviter le naufrage.

Ces dépenses se justifiaient et se justifient en raison des circonstances exceptionnelles. Mais elles viennent s’ajouter à notre dette déjà existante. Nous ne les financerons pas en augmentant les impôts : notre pays est déjà l’un de ceux où la fiscalité est la plus lourde, même si depuis trois ans nous avons commencé à la baisser. La seule réponse est de bâtir un modèle économique durable, plus fort, de travailler et de produire davantage pour ne pas dépendre des autres. Et cela, nous devons le faire, alors même que notre pays va connaître des faillites et des plans sociaux multiples en raison de l’arrêt de l’économie mondiale.   

Emmanuel Macron, 14 juin 2020

Écologie et productivisme

Le « en même temps » du président Macron a donc encore frappé. Ainsi, on va booster l’écologie, faire de la relance verte, penser à l’environnement et tout et tout. Mais on va aussi s’adonner à une très belle course à la production. Faire du nouveau monde avec les recettes de l’ancien.

Ceux qui suivent un peu l’actualité économique savent pourtant que, à ce stade, le président s’est contenté d’aider les filières les plus polluantes : l’automobile, l’aéronautique, le tourisme. On pourrait même s’en amuser : l’urgence du gouvernement est de sauver ce qui peut l’être de l’ancien monde productiviste. Et il promet une conversion écologique.

Face à ces contradictions, personne ne s’étonnera que ce discours sans grande annonce autre que la réouverture des restaurants parisiens demain et le retour obligatoire à l’école le 28 juin (si, si, ce n’est pas une blague) soulève un immense scepticisme dans l’opinion.

L’aveu de souverainisme

Une autre cause d’étonnement, voire d’amusement, tient aux nombreuses allusions à la souveraineté de la France, et tout particulièrement à sa souveraineté économique qui devrait donner lieu à un pacte productif. Ce n’est pas que l’idée soit déplaisante, mais enfin, les revirements d’opinion sont amusants. Les mots « souverainisme » et « souveraineté », étaient il y a encore six mois jugés par l’élite au pouvoir atrocement vulgaires, et même nationalistes, situés quelque part entre Marine Le Pen et Adolf Hitler. Et voici que, par l’opération du Saint-Coronavirus, la souveraineté économique devient un mot d’ordre officiel.

On pense ici à tous ces bourgeois parisiens qui s’étranglaient dès que la souveraineté du pays était mise sur la table. Et hop, les voilà obligés de manger leur chapeau et d’aduler ce qu’ils vomissaient hier avec le plus grand des mépris. Splendeur et misère des courtisans.

Il nous faut créer de nouveaux emplois en investissant dans notre indépendance technologique, numérique, industrielle et agricole. Par la recherche, la consolidation des filières, l’attractivité et les relocalisations lorsque cela se justifie. Un vrai pacte productif.   

Emmanuel Macron, 14 juin 2020

Mais qui paiera toutes ces promesses ?

Pour qu’Emmanuel Macron puisse annoncer sans ciller une telle prodigalité et une relance tous azimuts des investissements publics, c’est évidemment qu’il croit avoir une botte secrète : l’Allemagne paiera. « L’accord franco-allemand autour d’un endettement conjoint et d’un plan d’investissement pour redresser l’économie du continent est un tournant historique. «

On comprend bien ici le montage qui est annoncé aux Français : l’Allemagne prêtera sa signature à l’emprunt, et nous dépenserons l’argent pour préserver notre modèle social. Bien entendu, on signera des pactes et des accords pour faire de la calinothérapie collective, mais l’essentiel est ailleurs : l’Allemagne empruntera.

Il est assez désarmant de voir avec quelle naïveté la France se jette sur cette perspective sans aucun recul, alors que les quatre radins (Autriche, Pays-Bas, Danemark, Finlande) restent viscéralement opposés à des choix qui ne peuvent être adoptés qu’à l’unanimité.

Le risque d’une stratégie « tout-Allemagne »

On ne le dira jamais assez, mais cette conviction inébranlable dans le sauvetage de la France par maman Merkel est un calcul extrêmement risqué. Nous avons indiqué vendredi comment la stratégie française se présentait très mal dans ce dossier. Mais en Allemagne même, l’opposition risque d’être intense à un plan tel que le conçoit la France, avec une dépense sans contrôle.

Selon toute vraisemblance, le plan européen, s’il est adopté, inclura à la demande de l’Allemagne des mécanismes de conditionnalité dans les aides, de telle sorte qu’il sera sans doute beaucoup moins généreux et salvateur que ne l’annonce Emmanuel Macron. Mais il est très probable que les montants qu’il prévoira pour la France soient très inférieurs à ce que la majorité escompte.

Et ce jour-là, il faudra bien commencer à compter.

Le conseil européen par visioconférence de vendredi donnera sur ce sujet une première indication de tendance.


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