Marine Le Pen donnait voici quelques jours un long entretien au magazine L'Incorrect. Edouard Husson l'a lu et le commente dans la nouvelle lettre que lance Le courrier des stratèges ("Les droites de Husson") et à laquelle vous pouvez d'ores et déjà vous abonner. Extraits.

Marine Le Pen a déclaré sa candidature à l’élection présidentielle ce vendredi 9 avril 2021. Si beaucoup de commentateurs français et étrangers sont convaincus que sa victoire est devenue possible, comment la présidente du rassemblement Nationale profite-t-elle d’une situation apparemment favorable ? La candidate du débat raté a donné un entretien au magazine L’Incorrect. Eh bien le contenu est, malgré le titre de la publication, politiquement très correct ! La candidate montre que malgré les apparences, elle n’a pas bougé d’un iota depuis 2017 :
« Je crois qu’il n’y a plus de droite ni de gauche, mais ce n’est pas parce qu’on passe d’un clivage gauche/droite à un clivage mondialistes/nationaux qu’il ne faut pas savoir s’adresser, sans doute en des termes différents pour exprimer la même chose, aux patriotes qui viennent de l’ancienne droite et aux patriotes qui viennent de l’ancienne gauche. Le vrai sujet que je compte exposer à tous est: est-ce que l’on considère que la nation reste la structure qui permet de défendre l’identité, d’assurer la prospérité, d’apporter la sécurité – pas seulement physique – et de conserver au peuple sa souveraineté, ou est-ce qu’on est voué à basculer dans une optique post-nationale, où les frontières n’ont plus aucune importance, où l’on est d’ici comme on peut être d’ailleurs et où l’on appartient plus à une classe sociale qu’à un pays? »
Pas un mot pour la France des entrepreneurs
Certes. Mais qu’en est-il de la politique économique ? Poussée dans ses retranchements par les intervieweurs, la fille de Jean-Marie Le Pen s’en tire par une pirouette digne de Jacques Chirac : « Incontestablement, la sortie de l’euro a beaucoup effrayé. C’est pourquoi, dès 2017, nous avons décidé qu’il fallait entendre les inquiétudes de nos électeurs. Nous avons bien fait puisque, aux européennes de 2019, ils ont validé notre positionnement. Y a-t-il d’autres points qui posent problème ? » Il est frappant de constater que la candidate n’aborde jamais d’elle-même les sujets économiques. Elle n’a pas un mot pour la France des entrepreneurs, pour cette France active dont la création de richesse est ponctionnée de plus en plus par un Etat qui se nourrit de bureaucratie et d’inflation législative. (…)
"Arrêtez d'emm... les Français" (Georges Pompidou à Jacques Chirac, 1966)

Alors, un coup pour rien, cet entretien à L’Incorrect ? Les rédacteurs du journal, proche de Marion Maréchal, font le meilleur commentaire pour souligner indirectement ce qu’ils auraient voulu entendre :
« Ce que nous attendons du prochain chef de l’État, c’est que, quelle que soit la bannière sous laquelle il aura été élu, il mène une politique de droite. Profondément, viscéralement de droite, comme cela n’a pas été le cas depuis…? Depuis tellement long- temps que nous-mêmes en avons perdu le souvenir. Une politique de droite, pour faire simple et court, ce serait que l’essentiel des moyens de l’État soit consacré à ses fonctions régaliennes. Que l’État, pour reprendre la formule de Georges Pompidou, arrête « d’emmerder les Français ». Que les « forces vives » de la nation puissent prospérer en paix. Qu’il soit mis fin à l’inflation législative et réglementaire, et même, soyons fous, que la décrue soit engagée par la réduction substantielle des différents codes. »
On ne saurait mieux dire. Surtout si on se souvient que ces propos de Georges Pompidou s’adressaient à un certain Jacques Chirac, jeune énarque, qui arrivait dans le bureau du Premier ministre de l’époque avec une masse de parapheurs à signer.
Aucun des candidats briguant des suffrages à droite – et Madame Le Pen pas plus que les autres – ne met la question de la liberté au centre de son programme. C’est la meilleure assurance pour Emmanuel Macron d’être réélu. Et pour le pays de s’enfoncer un peu plus sur « la route de la servitude » (F. Hayek).
 
       
    
     
   
       
         
       
       
         
      