L'amende que la Commission Européenne inflige à X fait du bruit. Elle nourrit le sentiment que le réseau d'Elon Musk est un paradis de liberté face à un Vieux Continent de moins en moins libéral. Pourtant, la réalité est différente. Très différente ! car il n'y en a pas un pour racheter l'autre.

L'écosystème numérique mondial traverse actuellement une mutation structurelle profonde, catalysée par la collision frontale entre deux paradigmes normatifs antagonistes : l'expansionnisme réglementaire de l'Union européenne, incarné par le Règlement sur les Services Numériques (Digital Services Act - DSA), et la reformulation libertarienne de la gouvernance des contenus prônée par X (anciennement Twitter) sous l'égide d'Elon Musk.
Ce post patient et détaillé offre une exégèse exhaustive des mécanismes juridiques au sein du DSA qui permettent, directement ou indirectement, la régulation et la "censure" des contenus sur X. Il examine en profondeur les dispositifs algorithmiques et procéduraux spécifiques déployés par X pour orchestrer la visibilité des contenus sous sa doctrine "Freedom of Speech, Not Reach", tout en établissant une analyse comparative rigoureuse avec les stratégies de conformité adoptées par d'autres Très Grandes Plateformes en Ligne (VLOPs) telles que Meta, TikTok et YouTube.

L'analyse démontre que, bien que le DSA interdise explicitement les obligations de surveillance généralisée, son cadre de gestion des risques systémiques (articles 34 et 35) délègue de facto aux plateformes la responsabilité de mitiger les contenus qualifiés de "licites mais préjudiciables" (lawful but awful) — tels que la désinformation et les discours haineux non illégaux — par le biais d'ajustements algorithmiques et de choix de conception d'interface.
La dépendance de X envers le "filtrage de visibilité" (visibility filtering) et la modération décentralisée via les "Notes de la Communauté" (Community Notes) marque une divergence philosophique majeure par rapport aux modèles de modération centralisée de ses pairs, bien qu'elle opère techniquement au sein du même spectre de démotion algorithmique.

Les récentes actions coercitives de la Commission européenne, notamment l'amende de 120 millions d'euros infligée à X pour des violations de transparence, signalent une transition de la théorie législative vers une surveillance réglementaire offensive, ciblant les fonctionnalités de conception des plateformes (telles que les systèmes de vérification et les référentiels publicitaires) comme des leviers de contrôle indirect des contenus.
Cadre juridique du contrôle : les dispositions du DSA habilitant la régulation des contenus
Le Digital Services Act (DSA) instaure un régime réglementaire asymétrique qui substitue le paradigme classique de l'exemption de responsabilité conditionnelle par une logique de gestion proactive des risques. Pour les Très Grandes Plateformes en Ligne (VLOPs) comme X, la régulation ne se limite plus à l'obligation de retrait des contenus illégaux a posteriori ; elle impose une refonte structurelle des systèmes pour anticiper et neutraliser les risques sociétaux. La "censure" ou la régulation stricte de X trouve son fondement juridique dans une architecture complexe d'articles liant la conception de la plateforme au risque systémique.


