Ursula von der Leyen: à qui la faute?

Ursula von der Leyen: à qui la faute?

La présidente de la Commission Européenne Ursula von der Leyen a accumulé gaffes et erreurs d'appréciation depuis qu'elle est entrée en fonctions à l'automne 2019. Les Etats-membres sont prompts à la critiquer, à commencer par la France. C'est oublier que le choix des commissaires européens et en particulier de la présidence est le fait des Etats. Soucieux de ne pas créer une commission trop forte par les personnalités qu'ils nomment, les chefs de gouvernement ont mauvaise grâce, ensuite, à se plaindre de ce que l'UE fonctionne mal.

Au cours des semaines récentes, la Présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, a accumulé les ratés. En Turquie, l’UE s’est largement ridiculisée au travers de ce que certains ont qualifié de « sofagate », résultat d’erreurs de protocole dont il semble bien que la responsabilité soit à chercher du côté de la Commission. Puis la Présidente de la Commission a fait montre à l’égard de l’Ukraine d’une étonnante légèreté, en refusant de se rendre à l’invitation du président ukrainien aux cérémonies du trentième anniversaire de l’indépendance.  La Présidente achève de convaincre ceux qui pensent que la Commission ne doit pas sortir de son rôle limité – mais essentiel – de gardienne du bon fonctionnement du marché commun.

Disons-le tout net : si ces péripéties ne sont pas sans importance, elles doivent être replacées dans un contexte plus large. Et à cette aune, comment ne pas rappeler ici les débuts difficiles de Mme Von der Leyen ? Celle-ci, avec quelques voix de majorité au Parlement européen, n’a-t-elle pas été la plus mal élue des chefs de la Commission européenne ? N’a-t-elle pas mis au cœur de son programme le Green Deal, alors même que ce ne sont pas les  partis écologiques qui ont gagné les élections européennes de 2019 mais bien le centre-droit ? On pourrait continuer.

Qu’il soit permis ici d’essayer de tirer quelques enseignements.

Le mauvais choix est celui d'Emmanuel Macron

Premièrement, si l’une des principales, si ce n’est la principale, qualités du chef est le choix des hommes et des femmes, force est de constater – mais nous le savons bien – combien Emmanuel Macron est un mauvais chef. Car il faut rappeler ici – il s’en est d’ailleurs enorgueillit – que c’est bien le Président de la République qui a eu l’idée géniale de proposer Mme Von der Leyen à cette responsabilité. Il est vrai que la France, qui se désintéressait du poste de Commissaire au point de proposer Mme Goulard avec le succès que l’on connaît, avait dû se résoudre à ce que son champion, Mme Vestager (qui avait quelques mois auparavant interdit, à la fureur de Paris, la fusion Alstom/ Siemens) ne soit pas Présidente de la Commission (sic).

Deuxièmement, quand l’on réduit la politique à un spectacle, il n’est pas illogique que l’intendance ne suive pas. Car la raison essentielle de la nomination de Mme Von der Leyen n’était pas, comme elle aurait dû l’être, sa compétence. Il fallait, nouveau coup de canif à tant de femmes compétentes, nommer une femme « quoi qu’il en coûte ». Comment s’étonner ensuite d’une telle déconfiture ?

Troisièmement, lorsque l’on néglige les principes que l’on a soit même promus, des déconvenues sont possibles. Ardents soigneurs du « déficit démocratique », les dirigeants européens ont pourtant écarté le principe du Spitzencandidat (désigner comme président de la Commission le champion du parti arrivé en tête aux élections européennes) imposé en 2014 par le Parlement européen. Evidemment, à ce jeu, Manfred Weber aurait été élu Président de la Commission, idée insupportable pour un Emmanuel Macron ne pouvant se résoudre à la nomination d’un homme dont il avait publiquement dénoncé l’incompétence et le manque d’envergure pour le poste.

Les Etats ne veulent pas d'une Commission compétente: il faut assumer!

Plus largement, il faut oser se poser une question incorrecte : voulait-on vraiment placer à la tête de la Commission européenne une personnalité d’envergure ? Question sacrilège dira-t-on compte tenu de la puissance de l’engagement européen des principaux acteurs de la pièce. Pourtant, elle mérite d’être posée. En 2014, lors de la nomination du Président Juncker, le Premier ministre britannique s’était élevé contre le choix d’un homme symbolisant une Union européenne dont il pointait le rejet inquiétant par son pays. Si à coté de Mme Von der Leyen le président Juncker fait belle figure, la réponse est sans doute : non, personne ne voulait d’une personnalité d’envergure à la tête de la Commission européenne.

Le Général De Gaulle disait qu’il n’y avait pas de politique en dehors des réalités. Il n’y en a surtout pas, à tout le moins de bonnes politiques, sans un personnel politique de qualité, à l’aune d’un seul et unique critère : la compétence. A cet égard, les insuffisances de Mme Von der Leyen préjugent mal de l’avenir. Mais ne nous y trompons pas : les ratés européens commencent dans les États-membres