Malgré son absence au sommet du G20, Donald Trump a dominé les débats avec son plan de paix pour l’Ukraine. Un plan qui sacrifie la souveraineté d'un peuple sur l'autel du realpolitik. Les dirigeants européens, fragilisés, opposent une contre-proposition tout aussi interventionniste, et tentent d’exister politiquement en agitant la menace permanente d’une guerre qu’ils prétendent vouloir éviter.

Le sommet du G20 à Johannesburg devait marquer l'apogée d'un cycle de leadership du « Sud global ». Il n'aura été que le théâtre de l'agonie du multilatéralisme. Malgré le boycott officiel de Washington, l'ombre de Donald Trump a plané sur les débats, son plan de paix en 28 points pour l'Ukraine accaparant l'attention. Cette proposition, qui reprend les principales exigences du Kremlin, illustre une vérité crue : la paix se négocie trop souvent au détriment de la liberté des peuples, et les grandes puissances sont prêtes à dépecer une nation souveraine pour servir leurs intérêts géopolitiques.
L’UE réclame d’être consultée, mais ne propose rien, n’influence rien
Le « projet de paix pour l’Ukraine » proposé par Washington était au centre des discussions lors d’une réunion en marge du sommet du G20 qui s’est tenu à Johannesburg, en Afrique du Sud, le samedi 22 et le dimanche 23 novembre 2025.
Ce « plan de paix » en 28 points de l'administration Trump est une capitulation déguisée. Le plan Trump confronte Zelensky au choix existentiel entre "défendre sa souveraineté ou préserver le soutien américain". C'est le prix de sa dépendance.
Le plan, en exigeant une réduction de l'armée ukrainienne et le blocage de l'adhésion à l'OTAN, rompt avec le rêve expansionniste de l'Alliance, tout en offrant des "garanties de sécurité limitées".
Le cynisme est brutal, Trump exige une réponse rapide de Kyiv, et ses émissaires rencontreront les Ukrainiens en Suisse, dès cette semaine. Autrement dit : les Européens sont spectateurs. Leur réaction ? Publier une déclaration aussi creuse que prévisible, saluant « les efforts continus des États-Unis » tout en exprimant de vagues inquiétudes sur les limitations militaires imposées à l’Ukraine.

Dans cette "Déclaration des Leaders sur l’Ukraine", samedi, les dirigeants européens (Starmer, Merz, Macron, von der Leyen, Tusk,..) ont exprimé leur prudence et demandent à être "consultés".
Ces dirigeants ont souligné que ce plan en 28 points réunit déjà les éléments importants qui permettront d’instaurer une paix durable mais il a besoin d’être retravaillé. Selon eux, "les frontières ne doivent pas être modifiées par la force" tout en se disant préoccupée par les "limitations proposées sur les forces armées ukrainiennes".

Le plan européen de 24 points : une résistance tardive
Face au plan américain qui acte la soumission de Kyiv à Moscou, selon The Telegragh , l'Europe a sorti sa propre proposition.
Le contraste est saisissant : là où Trump entérine l'annexion russe et limite l'armée ukrainienne à 600 000 hommes, le plan européen de 24 points refuse toute concession territoriale préalable et prévoit un plafond à 800 000 soldats en temps de paix.
Surtout, il offre à l'Ukraine des garanties de sécurité solides, la perspective d'une adhésion à l'UE et ne ferme pas la porte à l'OTAN.
La reconstruction serait financée par les actifs russes gelés, et non par les contribuables européens comme le prévoit le plan Trump.
Ce plan européen porte en lui les germes des mêmes erreurs qui ont conduit à cette guerre. Le mécanisme de garanties sécurité de type Article 5, s'il peut rassurer à court terme, institutionnalise l'engagement perpétuel des puissances extérieures dans les conflits régionaux.
La promesse d'adhésion à l'UE signifie le transfert de nouvelles compétences à Bruxelles et l'alignement sur une politique étrangère commune qui a montré ses limites.
Quant au retour de la Russie dans le G8 dès 2026, il s'agit d'une concession majeure qui blanchit Poutine sans contrepartie réelle.
1 — Fin de la guerre et dispositions pour garantir qu’elle ne se répète pas, afin d’établir une base permanente pour une paix et une sécurité durables.
2 — Les deux parties au conflit s’engagent à un cessez-le-feu complet et inconditionnel dans les airs, sur terre et en mer.
3 — Les deux parties entament immédiatement des négociations sur la mise en œuvre technique du contrôle du cessez-le-feu, avec la participation des États-Unis et des pays européens.
4 — Un mécanisme international de surveillance du cessez-le-feu, dirigé par les États-Unis et assuré par les partenaires de l’Ukraine, est mis en place. La surveillance sera majoritairement à distance grâce aux satellites, drones et autres outils technologiques, avec un volet flexible sur le terrain pour enquêter sur les violations présumées.
5 — Un mécanisme sera créé pour permettre aux parties de signaler les violations du cessez-le-feu, d’enquêter sur celles-ci et de discuter des mesures correctives.
6 — La Russie renvoie sans condition tous les enfants ukrainiens déportés et déplacés illégalement. Le processus sera soutenu par des partenaires internationaux.
7 — Les parties au conflit procèdent à un échange de tous les prisonniers de guerre (principe du « tous contre tous »). La Russie libère tous les détenus civils.
8 — Après s’être assurées de la durabilité du cessez-le-feu, les parties prennent des mesures d’aide humanitaire, notamment des visites familiales de part et d’autre de la ligne de contact.
9 — La souveraineté de l’Ukraine est respectée et réaffirmée. L’Ukraine n’est pas forcée à la neutralité.
10 — L’Ukraine reçoit des garanties de sécurité solides et juridiquement contraignantes, y compris de la part des États-Unis (un accord de type Article 5), afin de prévenir toute future agression.
11 — Aucune restriction n’est imposée aux forces de défense ukrainiennes ni à l’industrie de défense ukrainienne, y compris en ce qui concerne la coopération internationale.
12 — Les États garants constitueront un groupe ad hoc de pays européens et de pays non européens volontaires. L’Ukraine demeure libre de décider de la présence, des armements et des opérations des forces amies invitées par son gouvernement sur son territoire.
13 — L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN dépend du consensus au sein de l’Alliance.
14 — L’Ukraine devient membre de l’Union européenne.
15 — L’Ukraine est prête à rester un État non nucléaire dans le cadre du TNP.
16 — Les questions territoriales seront discutées et résolues après un cessez-le-feu complet et inconditionnel.
17 — Les négociations territoriales partent de la ligne de contrôle actuelle.
18 — Une fois les questions territoriales réglées, la Russie et l’Ukraine s’engagent à ne pas modifier ces frontières par la force.
19 — L’Ukraine reprend le contrôle de la centrale nucléaire de Zaporijia (avec participation américaine), ainsi que du barrage de Kakhovka. Un mécanisme de transfert de contrôle sera établi.
20 — L’Ukraine bénéficie de passages sans entrave sur le fleuve Dnipro et du contrôle de l’isthme de Kinburn.
21 — L’Ukraine et ses partenaires mettent en œuvre une coopération économique sans restrictions.
22 — L’Ukraine sera entièrement reconstruite et indemnisée financièrement, notamment grâce aux avoirs souverains russes qui resteront gelés jusqu’à ce que la Russie compense les dommages causés à l’Ukraine.
23 — Les sanctions imposées à la Russie depuis 2014 pourront faire l’objet d’un allègement progressif et partiel après l’établissement d’une paix durable, et pourront être réimposées en cas de violation de l’accord de paix (mécanisme de « snapback »).
24 — Des discussions séparées s’ouvriront sur l’architecture de sécurité européenne, incluant tous les États de l’OSCE.
Des dirigeants européens impopulaires, artisans d'un climat anxiogène
Le point commun entre Keir Starmer, Friedrich Merz, Emmanuel Macron, Ursula von der Leyen ou Donald Tusk est leur profonde impopularité dans leur pays. À court de projets et en perte de légitimité, ils ne leur reste plus qu'à exister politiquement en entretenant un climat anxiogène de guerre.

Ils multiplient les déclarations solennelles et les consultations en marge du G20, affirmant leur « soutien continu » tout en se préparant à vendre Kyiv pour une « paix juste et durable ». Leur déclaration commune, pleine de réserves prudentes (« préoccupés par les limitations proposées »), révèle leur impuissance . Ils sont les figurants d'un jeu dont les règles sont écrites ailleurs.
Si le président brésilien Lula, lui, dénonce la manœuvre de Trump qui « essaie de prêcher la fin du multilatéralisme, et de renforcer l'unilatéralisme ».
Emmanuel Macron quant à lui, reconnaît que le G20 est en « risque » et « arrive peut-être à la fin d'un cycle ».
Le spectacle donné à Johannesburg est celui d'un système international en faillite. D'un côté, un unilatéralisme américain cynique qui négocie la souveraineté d'un peuple comme une monnaie d'échange. De l'autre, des dirigeants européens faibles et discrédités, qui agitent le drapeau de la solidarité tout en préparent la trahison. Au milieu, une nation ukrainienne sommée de choisir entre son existence et ses moyens de défense.


