Il faut saluer l’artiste. Dans le grand théâtre de la communication politique, on pensait avoir épuisé le répertoire : le ministre de l’Agriculture tâtant le flanc des vaches avec un air entendu, le premier ministre enfilant un casque de chantier un peu trop grand. Mais Rachida Dati, Ministre de la Culture, en plein exercice de ramassage d’ordures dans les rues de Paris ? C’est une performance qui frôle l'avant-garde.
Avec moi, Paris sera propre! 7 jours sur 7, 24 heures sur 24.
— Rachida Dati ن (@datirachida) November 21, 2025
Les Parisiens n’en peuvent plus de la saleté de leur ville. Ils n'attendent plus des promesses mais des résultats. Je serai la Maire des résultats! pic.twitter.com/I6WUeWW2Rq

Les vidéos tournent en boucle, hypnotiques. On y voit notre ministre, le brushing impeccable malgré l'adversité environnementale, soulever avec une détermination farouche des sacs-poubelles récalcitrants.
Face à cette soudaine vocation d'éboueuse de luxe, le citoyen lambda reste perplexe. Est-ce un élan de solidarité civique ? Une reconversion professionnelle audacieuse ? Une tentative désespérée de se rapprocher du peuple en partageant son quotidien olfactif ?
Permettez-moi d’émettre une autre hypothèse. Moins charitable, certes, mais avouons-le, bien plus divertissante.
Et si Rachida Dati ne ramassait pas les ordures, mais les inspectait ?

Rappelons que Madame Dati a, par le passé, démontré un talent certain – certains diraient un génie – pour dénicher des contrats de conseil particulièrement généreux. Que ce soit auprès de Renault ou de GDF Suez, des sommes rondelettes ont trouvé le chemin de ses comptes, sans que l’on comprenne toujours très bien la nature exacte de la prestation fournie. Les justificatifs semblaient aussi volatils qu'un sac plastique un jour de grand vent. Des miracles de la finance moderne, diront certains. De l’argent tombé du ciel, penseront d’autres.
Et si, tout simplement, l’argent ne tombait pas du ciel, mais finissait directement dans les poubelles ?
Forte de son expérience dans la recherche de financements "spontanés", Rachida Dati aurait flairé un nouveau filon. Dans une capitale où le luxe côtoie la crasse, les conteneurs parisiens pourraient bien être les nouveaux coffres-forts suisses. Oubliez le Panama, la vraie richesse est sur le trottoir.
Observez bien la vidéo. Ce n'est pas le geste las du citoyen excédé. C'est le regard concentré de l'archéologue découvrant Pompéi.
Elle ne se contente pas de jeter le sac négligemment dans la benne. Non, elle soupèse, elle tâte, elle analyse la texture. Ce geste expert, ce n’est pas celui d’une novice du tri sélectif, c’est celui d’une orfèvre à la recherche de la pépite.
"Celui-ci, non, trop léger. Des épluchures." "Ah, celui-là ! Le doux froissement du papier-monnaie… Fausse alerte, c'était un paquet de chips."
Un sac trop lourd ? Ce n'est peut-être pas du verre, mais une liasse de billets de 500 euros oubliée par un oligarque distrait, un lobbyiste pressé, ou peut-être même un reliquat de mission conseil égaré par un collègue.

Cette opération "mains propres" prend alors un tout autre sens. Il ne s'agit pas tant de nettoyer les trottoirs que de s'assurer qu'aucun magot n'échappe à sa vigilance. C’est l'économie circulaire poussée à son paroxysme : l'argent retourne à la rue, avant d'être soigneusement recyclé.
Alors, la prochaine fois que vous croiserez Madame Dati près d’un local à poubelles, ne la dérangez pas. Elle est en pleine consultation. Et qui sait, peut-être qu'entre une boîte de pizza froide et un journal de la veille, elle trouvera de quoi financer la prochaine grande exposition du Louvre.
Le dévouement à la chose publique, décidément, ne connaît pas de limites.
