Qatargate, Huaweigate: le Parlement européen contre la justice belge
Photo by Hassan Anayi / Unsplash

Qatargate, Huaweigate: le Parlement européen contre la justice belge


Partager cet article

Trois ans après le Qatargate, le Parlement européen refuse les demandes de levée d’immunité formulées par la justice belge. Derrière ce bras de fer institutionnel, une question dérangeante : l’Union européenne veut-elle vraiment être transparente — ou simplement préserver sa propre élite ?

Eva Kaili, ex-vice-présidente du Parlement européen, fait l’objet d’accusations de corruption et de blanchiment d’argent dans le cadre de l'affaire « Qatargate »

Selon une enquête d’Euractif, la relation entre le Parlement européen et la justice belge est de nouveau tendue. Le conflit entre les deux parties ne date pas d’hier. Depuis le scandale du Qatergate, le Parlement européen estime que les autorités belges s’impliquent trop dans le contrôle des institutions de l’UE. Une enquête sur une nouvelle affaire de corruption, la Huaweigate, a ravivé la confrontation.

Une nouvelle confrontation entre le Parlement européen et la justice belge

Il y a trois ans, des valises remplies d’argent ont été découvertes au domicile de la vice-présidente du Parlement européen, Eva Kaili. Les médias ont appelé ce scandale de corruption « Qatargate ». La présidente de l’institution, Roberta Metsola, a alors promis une coopération totale avec les enquêteurs belges dans la résolution de cette affaire.

Mais trois ans après l’éclatement de cette affaire de corruption, les autorités belges continuent à enquêter sur les pots-de-vin que le Qatar et le Maroc ont versés aux législateurs européens. Cela a généré une sorte de conflit entre les membres de la commission des Affaires juridiques (JURI) du Parlement et les procureurs belges. Une nouvelle enquête concernant l’affaire Huaweigate n’a fait que raviver la confrontation.

Selon les informations divulguées en mars, le géant de la télécommunication chinois Huawei a offert des cadeaux à des eurodéputés afin d’influencer leurs décisions en sa faveure. Roberta Metsola et plusieurs parlementaires européens ont immédiatement manifesté leur indignation suite à l’éclatement de cette affaire. Le conflit a éclaté lorsque les procureurs belges ont demandé la levée d’immunité d’une eurodéputée soupçonnée d’avoir participé à la réunion avec Huawei. Pourtant, les enquêtes ont révélé que c’était une fausse accusation, vite exploitée par le Parlement pour remettre en cause la crédibilité des enquêteurs.

Metsola a qualifié de « négligence » cette démarche des autorités belges et elle a déclaré qu’elle va protéger le Parlement contre toute accusation injustifiée pouvant nuire à sa réputation.

Résultat : le Parlement refuse de donner suite aux demandes des autorités belges visant à lever l’immunité de quatre autres eurodéputés soupçonnés d’avoir participé à cette affaire de corruption.. La transparence promise en 2022 semble déjà enterrée.

La commission JURI : le labyrinthe du blocage

Le cœur de cette obstruction réside dans la Commission des Affaires juridiques (JURI). Chargée d'examiner les demandes de levée d'immunité, cette commission est un frein volontaire.

Ses membres exigent des procureurs belges des preuves « solides » avant même d'accorder la levée. La procureure Ann Fransen a clairement rappelé la règle : les députés doivent seulement vérifier si la demande est politique, pas exiger l'accès aux preuves d'une enquête en cours.

Exiger l'accès aux preuves compromet le secret de l’enquête et alerte les suspects. Le Parlement demande l'impossible pour justifier l'immobilisme.

Ce délai de plusieurs mois, qualifié de « sans précédent » dans le cas Huawei, n'est pas une simple lenteur. C'est de la résistance institutionnelle. Les décisions sur l'immunité sont devenues des « monnaies d'échange » entre groupes politiques. La protection de l’institution passe avant la justice.

Ce bras de fer illustre une tension plus profonde : le Parlement européen, censé être le cœur démocratique de l’UE, se comporte ici comme une forteresse administrative, jalouse de ses privilèges et peu encline à la transparence.

Bureaucratie, lenteur et hypocrisie institutionnelle

La commission juridique du Parlement met généralement quelques mois pour traiter ces affaires.Cette fois, cela traîne depuis plus d’un an. Les discussions s’éternisent, les demandes se multiplient, et les procédures s’enlisent dans des querelles de formulaires.

Certains députés reconnaissent en privé que les décisions d’immunité sont devenues des instruments politiques, négociés entre groupes parlementaires.
Autrement dit : la justice est suspendue au bon vouloir des partis.

Dans un contexte où les scandales d’influence étrangère se multiplient, cette attitude nourrit le soupçon que Bruxelles préfère étouffer les affaires plutôt que les élucider.

Tant que le Parlement contrôlera la levée de l'immunité de ses propres membres, il sera à la fois juge et partie. Il est urgent de retirer ce pouvoir au Parlement pour garantir l'indépendance des enquêtes.


Partager cet article
Commentaires

S'abonner au Courrier des Stratèges

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter pour ne rien manquer de l'actualité.

Abonnement en cours...
You've been subscribed!
Quelque chose s'est mal passé
L'illusion de la transparence : ce que Trump refuse (encore) de nous montrer sur Epstein, par Elise Rochefort

L'illusion de la transparence : ce que Trump refuse (encore) de nous montrer sur Epstein, par Elise Rochefort

Trump nous avait promis le "Grand Déballage". Avec la promulgation de l'Epstein Files Transparency Act en novembre dernier, la rhétorique officielle était celle d'une ouverture totale des vannes. Le Congrès avait parlé, le Président Trump avait signé, et le Département de la Justice (DOJ) avait jusqu'au 19 décembre pour livrer au public "tous" les documents. Nous sommes fin décembre, et si le volume de fichiers déversés sur le portail du DOJ donne le vertige, une analyse minutieuse révèle qu


Rédaction

Rédaction

Comment la caste a transformé le chaos en rente

Comment la caste a transformé le chaos en rente

On vous ment. Depuis des mois, le narratif médiatique dominant vous vend la fable de l'incompétence de l'Etat et des parlementaires, incapables d'être raisonnables et responsables. On vous explique, trémolos dans la voix, que le dérapage du déficit public à près de 7 % du PIB, l'explosion de la dette à 3 300 milliards d'euros et la chute du gouvernement Barnier sont les fruits d'une "perte de contrôle". On voudrait vous faire croire que l'État français, ce mastodonte technocratique qui prélève


Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Les 7 victoires de la Liberté en 2025

Les 7 victoires de la Liberté en 2025

En ce jour de Noël, alors que la Chrétienté célèbre la Nativité et que le monde profane marque une pause dans sa course effrénée vers le néant, il est de bon ton de sacrifier au rituel du bilan. Mais pour nous, lecteurs et acteurs de la résistance au mondialisme au sein du Courrier des Stratèges, l'exercice ne saurait se limiter à la recension comptable des événements. Il s'agit de lire les signes des temps. Il s'agit de scruter, sous l'écume des crises que les médias mainstream se plaisent à dr


Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Noël, invention chrétienne ou païenne ? par Thibault de Varenne

Noël, invention chrétienne ou païenne ? par Thibault de Varenne

Chaque année, au seuil du solstice, les peuples d’Europe rallument les feux de la mémoire. Les cloches sonnent, les foyers s’illuminent, et l’on se demande : Noël est-il une fête chrétienne, née de la célébration de la Nativité, ou bien l’héritière de rites païens que l’Église aurait recouverts de son manteau sacré ? La réponse exige une enquête à la fois linguistique, historique et religieuse. L’étymologie du mot « Noël » : une origine chrétienne indéniable Le mot Noël provient du latin nata


Rédaction

Rédaction