Pourquoi résister au mondialisme en demandant plus de services publics est une imposture

Pourquoi réclamer plus d’État-nation, c’est choisir son geôlier, pas sa liberté.

Le débat public est saturé d’un paradoxe assourdissant. Une clameur s’élève contre le « mondialisme », cette hydre bureaucratique et lointaine qui déposséderait les peuples de leur destin. Ces mêmes voix, pourtant, implorent avec une ferveur égale un remède qui aggrave le mal : plus d’État, plus d’impôts, plus de services publics. Cette prétendue résistance est une imposture intellectuelle. Elle ne vise pas à briser les chaînes, mais à en choisir la nationalité. Elle ne combat pas l’oppression, elle se dispute l’identité de l’oppresseur.

La véritable ligne de front n’est pas entre Paris et Bruxelles. Elle est, et a toujours été, entre l’Individu et l’État. La résistance authentique au mondialisme coercitif ne peut être qu’une résistance à l’étatisme lui-même. Ceux qui prétendent nous libérer de Bruxelles en renforçant la machine administrative française ne sont pas des résistants ; ce sont les candidats à la gestion d’une prison plus petite, mais tout aussi verrouillée.

La seule souveraineté qui vaille : la vôtre

Pour démasquer cette supercherie, il faut revenir à la source : la souveraineté n’est pas un attribut mystique de la « Nation », mais une propriété fondamentale de l’individu. Comme l’écrivait Frédéric Bastiat, « Personnalité, Liberté, Propriété, — voilà l'homme ». Ces droits ne sont pas une concession de l’État ; ils lui sont « antérieurs et supérieurs ». Votre corps, vos biens légitimement acquis, sont l’extension physique de votre personne, votre territoire souverain.

Chaque fois que vous entendez un politique promettre « plus de services publics », traduisez : il vous propose de violer plus souvent et plus profondément votre souveraineté. Chaque impôt prélevé pour financer une mission qui outrepasse la stricte protection de vos droits – la sécurité, la justice – est une agression contre votre propriété. C’est ce que Bastiat nommait la « spoliation légale » : la Loi, de bouclier, devient une arme. L’État, cette « grande fiction à travers laquelle chacun essaie de vivre aux dépens de tous », se transforme en un gigantesque mécanisme de pillage organisé, légitimé par le vote4

Le « résistant » étatiste ne s’oppose donc pas au principe de la spoliation ; il en réclame le monopole national. Il veut que le pillage soit certifié « Origine France Garantie ». Pour l’individu spolié, la nationalité du percepteur est une bien maigre consolation.

Le mondialisme, cet étatisme qui ne dit pas son nom

La deuxième illusion est de croire que le « mondialisme » combattu est une forme de capitalisme débridé. C’est tout le contraire. L’Union Européenne n’est pas un espace de libre-échange, mais un marché administré, un monstre de planification centrale qui réglemente tout, de la sécurité des jouets à la protection de vos données. C’est l’étatisme à l’échelle continentale.

La preuve la plus flagrante de la complicité des États-nations est le phénomène de la « surtransposition ». Quand la France adopte des normes nationales plus contraignantes que ce qu’exige Bruxelles, elle ne résiste pas : elle collabore. L’administration française utilise la directive européenne comme un prétexte pour étendre son propre pouvoir, justifier ses effectifs et sa complexité. L’État français et l’État bruxellois ne sont pas des adversaires, mais des partenaires dans l’étouffement de l’individu et de l’entrepreneur.

Comme l’avait prophétisé Friedrich Hayek dans La Route de la Servitude, la planification centrale, qu’elle soit nationale ou internationale, mène inéluctablement à la tyrannie. Elle détruit la liberté en substituant les décisions d’un comité à celles de millions d’individus. Le « souverainiste » qui veut remplacer le plan européen par un plan français ne change pas de destination ; il se bat simplement pour tenir le volant d’un véhicule qui fonce vers le même précipice : l’asservissement de l’individu au collectif.

Le mirage populiste : même poison, autre flacon

Regardons sans fard les programmes des champions autoproclamés de la « résistance ». Du Rassemblement National au Nouveau Front Populaire, le projet est le même : toujours plus d’État. Blocage des prix, protectionnisme, embauches massives de fonctionnaires, augmentation écrasante des impôts. Leurs propositions sont une déclaration de guerre à la liberté économique et à la propriété privée.

Le RN veut contrôler les prix via la TVA et imposer aux cantines 80% de produits français, dictant ainsi aux consommateurs et aux producteurs leurs choix. Le NFP, plus direct encore, veut bloquer les prix par décret et augmenter le SMIC autoritairement, ignorant les lois les plus élémentaires de l’économie. Les deux camps rivalisent d’ingéniosité pour alourdir la fiscalité et étendre le périmètre de la spoliation légale. Leur « souverainisme » est un mensonge. Ils ne veulent pas rendre le pouvoir au peuple, mais le concentrer davantage dans les mains d’une caste politico-administrative nationale.

Ce réflexe étatiste est une maladie française, une addiction historique. De Colbert à la planification d’après-guerre, en passant par la centralisation jacobine, notre culture politique a été façonnée par la dépendance à l’État-providence. Avec un taux de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés au monde (43,2% du PIB en 2023), la France est déjà un cas d’école de servitude volontaire. Face à chaque crise, le citoyen français ne se demande pas comment être plus libre, mais comment être mieux protégé, renforçant ainsi la cage qui l’emprisonne.

La seule vraie résistance : la défection

Alors, que faire? La réponse ne se trouve pas dans les urnes, qui ne proposent que de choisir son maître. La véritable résistance est ailleurs. L’économiste Albert Hirschman a théorisé trois réponses face à la défaillance d’une organisation : la loyauté, la prise de parole (voice) et la défection (exit).

Le populiste est l’homme de la voice. Il manifeste, il vote, il pétitionne. Il crie sur son geôlier pour qu’il améliore l’ordinaire de la prison. Mais en agissant ainsi, il légitime l’existence même de la prison et son propre statut de prisonnier.

La résistance libertarienne est celle de l’exit. Elle ne cherche pas à réformer le système de l’intérieur, mais à s’en extraire. C’est l’acte d’un individu souverain qui retire son consentement et sa participation à un système coercitif. C’est la stratégie du client mécontent qui change de fournisseur, pas celle du sujet qui implore son roi.

Cette défection n’est plus une utopie. À l’ère numérique, ses outils sont à portée de main. La résistance fiscale, par l’optimisation ou la désobéissance civile, permet d’assécher la source de financement de la machine étatique. Mais l’arme la plus révolutionnaire est monétaire. Le monopole de l’État sur la monnaie est la clé de voûte de son pouvoir. L’inflation n’est qu’un impôt déguisé, une spoliation silencieuse.

Les cryptomonnaies, et le Bitcoin en premier lieu, offrent une porte de sortie historique. En créant un système monétaire décentralisé, hors de portée des banques centrales et des gouvernements, elles permettent aux individus de reprendre le contrôle de leur épargne et de leurs échanges. C’est un acte de souveraineté individuelle radical. Alors que les États cherchent à créer leurs propres monnaies numériques pour renforcer la surveillance, le Bitcoin incarne la défiance et la liberté.