Sous couvert d’attendre la “finalisation” de la Commission européenne, Emmanuel Macron semble préparer un revirement sur l’accord UE-Mercosur. En 2019, à Osaka (G20) , il promettait un “accord équilibré”. En 2025, il semble prêt à le valider, quitte à sacrifier les agriculteurs.

Le mardi 28 octobre, 44 organisations de la société civile ont demandé à Emmanuel Macron de « clarifier » la position de la France concernant l’accord UE-Mercusor dans une lettre ouverte. Le chef d’Etat a effectivement tenu des propos ambigus à l’issue du Conseil européen. Il a sous-entendu annoncer que le traité est en cours d’adoption. Ces organisations exigent que le président français empêche la signature de cet accord.
Une demande de « clarification publique »
Le jeudi 23 octobre, le jour du Conseil européen, Emmanuel Macron a fait une déclaration à propos de l’accord commercial entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay), plus connu sous le nom d’accord UE-Mercosur. Le locataire de l’Elysée a laissé entendre que le traité sera adopté définitivement dans un avenir proche. La Commission européenne va réaliser le travail de « finalisation ».
Notons que jusqu’à présent, la France a rejeté ouvertement cet accord. Après sa signature le 6 décembre 2024, Emmanuel Macron a déclaré que c’était un projet « inacceptable en l’état ». Il a mis en avant ses craintes sur l’impact négatif de ce traité sur l’avenir du secteur agricole en France et sur l’environnement. Le 3 septembre 2025, la dernière version de l’accord a été rédigée. Elle renferme des mesures de sauvegarde pour « les produits européens sensibles ».
Selon l’annonce de Bruxelles, le document a été envoyé aux pays des Mercosur et on attend leur avis concernant les mesures de sauvegardes.
« Aujourd’hui le gouvernement français, comme les autres d’ailleurs, attend ces réponses. Mais tout ça va dans le bon sens pour protéger les secteurs qui sont les plus exposés et aussi protéger les consommateurs européens »
a déclaré le chef d’Etat français.
Ce genre de déclaration a suscité de l’inquiétude de quarante-quatre organisations(de la Confédération paysanne à Greenpeace ). Le mardi 28 octobre, elles ont exigé une “clarification publique” de la position française et la construction d’une minorité de blocage avec les pays réticents (Autriche, Irlande, Pays-Bas, Pologne).
Leur crainte est simple : que Paris cède discrètement sous pression allemande et bruxelloise, en échange de concessions politiques. La division du traité en plusieurs volets, notamment commerciaux, faciliterait cette manœuvre, permettant à la France d’approuver “en partie” ce qu’elle prétend rejeter “en bloc”.
Un faux débat écologique mais un vrai enjeu de souveraineté
La France joue la montre pendant que l’Allemagne, fidèle à son libéralisme commercial, pousse pour une ratification rapide. Le chancelier Friedrich Merz n’a pas caché son enthousiasme : “La voie est libre pour le Mercosur”, a-t-il déclaré.
Sous prétexte de défendre l’environnement, Macron masque mal les véritables enjeux : l’abandon d’une part de la souveraineté économique française au profit d’une politique commerciale européenne uniformisée.
Accepter l’accord Mercosur, c’est admettre une mise en concurrence directe entre les agriculteurs français et les exploitations sud-américaines, où les normes environnementales sont bien plus souples.
Les promesses de “mesures de sauvegarde” ne sont qu’un alibi pour justifier une ouverture des marchés dictée par Bruxelles.
Soit Emmanuel Macron assume son revirement et trahit ses promesses protectionnistes sous la pression de Berlin et des lobbys free-trade, soit il écoute la société civile, les agriculteurs et la raison pour construire enfin une minorité de blocage crédible.
Son hésitation actuelle n'est pas de la diplomatie : c'est une faute. La souveraineté de la France ne se négocie pas dans les couloirs de Bruxelles au prix d'un accord climaticide et anti-économique.

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