L’État contre l'hôpital : quand la réglementation organise la pénurie, par Veerle Daens

L’État contre l'hôpital : quand la réglementation organise la pénurie, par Veerle Daens


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Il faut une dose considérable d'aveuglement idéologique, ou peut-être simplement l'arrogance typique de l'administration centrale, pour déplorer d'une part la crise profonde des vocations dans le secteur de la santé, et d'autre part, multiplier les obstacles pour y accéder. C'est pourtant l'exploit que réalise le gouvernement avec l'article 20 du Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.

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L’article 20 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une vaccination obligatoire de nombreux personnels hospitaliers contre la grippe. Certains y ont vu une façon habile, un “curiaçage” des personnels soignants pour imposer le vaccin à l’ARN, après les moments douloureux du COVID. Qu’en est-il exactement

Cet article, sous couvert de santé publique, vise à renforcer l'arsenal coercitif de l'État en durcissant les obligations vaccinales imposées aux professionnels de santé. Le spectacle est affligeant : l’État organise la pénurie qu’il prétendra combattre demain.

Il convient ici de rappeler une loi économique fondamentale, que les dirigistes de tous bords s'évertuent à ignorer : toute réglementation est une restriction. Toute obligation est une barrière à l'entrée. En régulant un bien ou un service, l'État n'en facilite pas l'accès ; il le raréfie. Il ne crée pas l'abondance ; il organise la disette.

Le marché du travail dans la santé n'échappe pas à cette règle. Hôpitaux au bord de la rupture, déserts médicaux grandissants, personnel épuisé : le tableau est suffisamment sombre. Face à cette situation, quelle est la réponse bureaucratique ? Ajouter une couche de contrainte. Plutôt que de s'interroger sur les causes profondes de la désaffection – conditions de travail déplorables, rémunérations contraintes par la mainmise étatique, bureaucratie envahissante – le gouvernement choisit le bâton.

L'obsession réglementaire, maladie chronique de la Sécurité sociale et de l'étatisme à la française, devient ici littéralement dangereuse. En décidant qui a le droit de soigner sur la base de critères administratifs toujours plus stricts, et en violant au passage le principe fondamental de l'autonomie corporelle, l'État garantit que moins d'individus choisiront ces professions vitales. Ceux qui sont déjà en poste seront tentés de fuir un système qui leur refuse la liberté la plus élémentaire : celle de disposer de leur propre corps.

Cette dérive n'est pas un accident, mais un symptôme. Elle est révélatrice d'un réflexe propre au macronisme, cette technocratie persuadée qu'elle peut piloter la société depuis un tableau Excel. Face à un problème complexe, la liberté individuelle, la confiance dans la responsabilité des acteurs ou l'incitation ne sont jamais envisagées. Seule la contrainte légale semble être un outil valable.

C'est la logique du planificateur central qui, voyant que ses plans échouent, en conclut qu'il n'a pas assez planifié. Voyant que la réglementation étouffe le système de santé, il en conclut qu'il faut réglementer davantage.

L'article 20 n'est pas une mesure de protection, c'est un acte d'auto-sabotage sanitaire. Si nous voulons plus de soignants, plus de soins et une meilleure santé pour tous, le chemin n'est pas celui de la coercition, mais celui de la liberté retrouvée. L'abondance ne naît que de la liberté ; la contrainte, elle, n'engendre que la misère et la pénurie.


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