Le CSA, Eric et Mohamed: quand Monsieur Zemmour se débat avec la liberté

Le CSA, Eric et Mohamed: quand Monsieur Zemmour se débat avec la liberté

Eric Zemmour se voir obligé de renoncer à sa participation sur CNews tant qu'il caressera un destin présidentiel. La nouvelle tombe en même temps qu'une déclaration du chroniqueur potentiellement candidat, par laquelle celui-ci dit que s'il était président il interdirait qu'une famille puisse donner Mohamed comme premier prénom à un fils. Tout le paradoxe des relations entre Zemmour et la liberté se trouve dans cette coïncidence. D'un côté, le polémiste a courageusement fait usage de sa liberté d'expression - et régulièrement on a voulu l'empêcher de parler. De l'autre, il semble oublier, lui le chantre de la "civilisation française", que la liberté en est partie intégrante.

Le CSA contre la liberté  de débat

CNews n’a pas eu d’autre choix que de se séparer d’Eric Zemmour après que le CSA a demandé aux chaînes où intervient l’essayiste et chroniqueur de « décompter les interventions de M. Éric Zemmour portant sur le débat politique national« . Le Conseil supérieur de l’audiovisuel motive ainsi sa décision: « Le CSA rappelle que les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 prévoient la prise en compte des interventions des personnalités politiques. Au regard des récents développements, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a considéré que M. Zemmour pouvait être regardé dorénavant, tant par ses prises de position et ses actions, que par les commentaires auxquels elles donnent lieu, comme un acteur du débat politique national ». 

Ce communiqué ne restera dans l’histoire que comme un exemple de plus de la politisation d’un conseil qui devrait être indépendant et, surtout, se garder à tout prix du « deux poids, deux mesures ». On ne sache pas que le Conseil ait passé beaucoup de temps à trouver un moyen de décompter l’instrumentalisation par Monsieur Macron de la fonction présidentielle et des moyens qu’elle lui met à disposition pour faire campagne avant de déclarer officiellement qu’il se représente. Nous savons que la République est menacée par la politisation des instances d’arbitrage. Et nous en avons une nouvelle preuve. 

Ce n’est pas seulement Eric Zemmour et son courage d’intellectuel que visent le CSA. Ce sont les centaines de milliers de téléspectateurs que le chroniqueur attire, parce qu’il nomme un certain nombre des problèmes qui accablent la France, à commencer par l’immigration incontrôlée et l’insécurité. 

En la personne d’Eric Zemmour, ce sont bien le courage et la liberté d’esprit qui sont visés par des « Sages de l’audiovisuel » devenus très déraisonnables. 

Mais Eric Zemmour aussi, en intellectuel français, a du mal avec la liberté

C’est bien ce courage et cette liberté d’esprit que le polémiste a montrés samedi 11 septembre face à Laurent Ruquier et Léa Salamé sur le plateau de France 2, pour l’émission « On Est En Direct« . Il nous faudrait un George Bernanos ou le regretté Philippe Muray pour épingler de quelques phrases féroces la fatuité et l’agressivité bornée des deux animateurs de l’émission.  On aimerait imaginer nos petits marquis face à des talibans. Ils n’en mèneraient pas large, alors qu’ils se comportent grossièrement face à un polémiste brillant, qui fait honneur à la tradition française de l’intellectuel. 

Eric Zemmour est bien un intellectuel français, avec ses qualités et ses défauts. Il a certes cette faculté à dénoncer modes, intimidations et terrorisme idéologique. Mais il n’échappe pas non plus à la tentation d’un esprit de système à rebours. En fait, comme tous les intellectuels français depuis Voltaire (l’inventeur du complot jésuite), Rousseau (le Suisse fasciné par l’Etat) et Montesquieu (le libéral persuadé que le climat détermine les comportements), Eric Zemmour témoigne des relations tendues entre l’intellectuel et la liberté. Il voudrait revenir à a conception napoléonienne de l’Etat pour sauver l’identité française. 

  • Eric Zemmour est tellement pris par ce qu’il dénonce lucidement, qu’il est porteur d’un certain fatalisme. A l’en croire, la France n’aurait plus beaucoup d’occasions de remonter la pente.  D’où sa pulsion bonapartiste. 
  • il est fasciné par l’Etat, au point de ne plus voir que tout ce qu’il dénonce vient de l’emprise démesurée de l’Etat sur tous les aspects de la vie sociale. Et il ne fait, au fond, que proposer de revenir à l’étatisme d’avant – celui de Napoléon – pour contrer celui d’aujourd’hui. Typique fut, ce point de vue, la proposition de revenir à la loi sur les prénoms de 1803 – afin d’interdire que « Mohammed » puisse être attribué en premier prénom. C’est une proposition à la fois inacceptable et inapplicable. 
  • En fait, Eric Zemmour a, comme quasiment tous  les intellectuels français, du mal à développer une pensée de la liberté. Cela s’est vu au moment du passe sanitaire, qu’il a d’abord considéré comme un sujet secondaire, ou comme une ruse d’Emmanuel Macron pour détourner de la question principale, « civilisationnelle », celle de l’identité française.  Ensuite, parce qu’il a reçu de nombreux messages en ce sens, il a commencé à tenir un discours un peu plus lucide sur la tyrannie macronienne. Mais Eric Zemmour semble passer à côté du fait que la liberté est civilisationnelle en France, elle est constitutive de l’identité française. 

Pour qu’un musulman appelle un jour son fils Eric….

Eric Zemmour ne semble pas voir que sans liberté, il ne peut y avoir cette laïcité qu’il défend brillamment contre l’Islam. Il ne veut pas voir que le macronisme est de bout en bout un système liberticide, dont tout découle: l’endettement de l’Etat aussi bien que l’immigration incontrôlée; la limitation de l’école privée comme le pass sanitaire; l’écologie liberticide comme l’insécurité. 

C’est parce que, comme le disait le Général de Gaulle, il existe « un pacte vingt fois séculaire entre la France et la liberté du monde » qu’Eric Zemmour peut être ce qu’il est. un esprit qui dénonce les impostures du moment. 

La grande mission du prochain président français sera de faire reculer l’interventionnisme étatique partout où cela est nécessaire, pour libérer les forces vives de la nation, refaire les corps constitués, relancer la machine à assimiler. Je souhaite comme Eric Zemmour que le modèle spirituel, culturel, éducatif français retrouve sa force de francisation des personnes qui vivent sur notre sol. Mais à la différence de lui je ne vois pas d’autre manière de s’y prendre que faire reculer l’emprise d’un Etat aussi obèse qu’impuissant à faire ce pour quoi il a été construit (défendre le pays, assurer la sûreté des citoyens et rendre la justice). 

Eric Zemmour passe à côté du fait que beaucoup des soignants qui se battent aujourd’hui contre le passe sanitaire sont des médecins ou des infirmiers issus de l’immigration. Ils participent à la défense de l’identité française autant que lui, Eric Zemmour. C’est pourquoi, il serait absurde de vouloir leur dire quel prénom donner à leurs enfants.  Pour qu’un immigré ait envie d’appeler son fils Emmanuel ou Anne, encore faudrait-il que ceux qui portent ces prénoms et font de la politique soient des exemples à suivre.