Coupure du gaz russe : une illusion de souveraineté énergétique qui coûtera cher

Coupure du gaz russe : une illusion de souveraineté énergétique qui coûtera cher


Partager cet article

L'UE vient d'entériner l'interdiction du gaz russe d'ici 2027. Présentée comme un acte de souveraineté, cette décision scelle en réalité une nouvelle dépendance, plus coûteuse et plus aléatoire, au gaz naturel liquéfié (GNL) américain. Sous l'égide de von der Leyen, l'Europe s'enfonce dans le double piège de la soumission géopolitique et du fanatisme normatif.

L’Union européenne a officiellement signé, mercredi 3 décembre, son arrêt de mort énergétique. Une feuille de route baptisée REPowerUE a été établie. Dans un accord politique provisoire conclu par le Parlement européen et le Conseil, les échéances pour la fin définitive des importations de gaz russe et l’abandon progressif des combustibles fossiles russes ont été fixées. Sous le prétexte moral d’« épuiser le coffre de guerre de Poutine », les institutions bruxelloises, avec à leur tête Ursula von der Leyen, ont acté l’interdiction des importations de gaz russe d’ici fin 2027. Elle marque l’abandon délibéré d’une source d’approvisionnement stable et compétitive – le gazoduc russe – au profit d’un vassalisme énergétique envers les États-Unis et le Qatar, fournisseurs de Gaz Naturel Liquéfié (GNL).

Le gaz russe, toujours incontournable dans l’UE… par Philippe Migault
Si l’Union européenne a diversifié au maximum ses sources d’approvisionnement en gaz depuis un an afin de ne plus dépendre

Fin définitive des importations de gaz russe en 2027

« Aujourd’hui, nous entrons dans l’ère de l’indépendance énergétique totale de l’Europe vis-à-vis de la Russie », a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, après l’annonce d’un accord politique provisoire sur l’arrêt définitif des importations de gaz russe et la sortie progressive des combustibles fossiles russes. Conclu entre le Parlement européen et le Conseil, il fixe les échéances à respecter par tous les Etats membres de l’UE.

Selon cet accord, l’arrêt des importations de gaz russe se fera progressivement. En effet, les importations de Gaz naturel liquéfié (GNL) doivent cesser au plus tard le 31 décembre 2026. Celles de gazoduc devront s’arrêter d’ici le 30 septembre 2027. Pour les Etats membres de l’UE qui rencontrent des difficultés pour atteindre leurs niveaux stockage, une prolongation du délai jusqu’au 31 octobre 2027 est accordée. 

Interdiction du gaz russe : quand l’idéologisme de l’UE ruine le peuple, par Thibault de Varenne
L’UE veut interdire le gaz russe sur son sol à partir de 2028. Mais elle veut imposer des contraintes morales et environnementales aux autres fournisseurs : le Qatar et les USA. Chronique d’une explosion des prix annoncée. Il faut poser les questions simplement, car les réponses, dictées par le réel, sont

Les échéances varient toutefois selon le type et la durée des contrats déjà établis. L’interdiction des importations de GNL entrera en vigueur à partir du 25 avril 2026 pour les contrats d’approvisionnement à court terme signés avant le 17 juin 2025. Elle s’appliquera à partir du 17 juin 2026 pour le gazoduc.

Pour les contrats à long terme conclus avant le 17 juin, l’interdiction d’importations de GNL sera en vigueur à compter du 1er janvier 2027. L’échéance est fixée au 30 septembre 2027 pour le gazoduc. Cela dit, si les objectifs de stockage ne sont pas atteints, le délai peut s’étendre jusqu’au 1er novembre 2027.

Cet accord conclu entre le Parlement et le conseil interdit toute modification des contrats existants, sauf pour des raisons opérationnelles spécifiques. Il comprend aussi différentes mesures pour assurer le respect de l’interdiction d’importation de gaz russe. Un système de conformité et de surveillance a été mis en place pour optimiser « la transparence, le suivi et la traçabilité du gaz russe sur les marchés de l’UE ». Selon cet accord, les importateurs de gaz non russe doivent aussi fournir des informations exhaustives concernant le pays producteur.

La soumission au GNL et la double peine européenne

L'Europe dépendra désormais du GNL américain et cette dépendance va s'accroître, car les États-Unis sont le seul producteur capable de combler immédiatement le vide laissé par l'interdiction du gaz russe en 2026-2027.

L'arrêt permanent des importations de gaz russe (GNL d'ici fin 2026, gazoduc d'ici fin 2027) constitue la première peine que s'inflige le continent. En se coupant d'un fournisseur majeur et historiquement compétitif, l'UE accepte de facto un approvisionnement plus cher et soumis aux aléas du marché mondial du GNL. En octobre, la Russie représentait encore 12% des importations de gaz de l'UE, et ce, malgré la crise, illustrant la difficulté de trouver des substituts viables à court terme.

Cette décision, prise sous la pression et l'influence de Trump qui y voit une formidable opportunité de marché, place l'Europe sous la dépendance énergétique des États-Unis.

Pour remplacer le gaz russe, Macron fait de l’huile
La rentrée prend forme et, à petits pas, comme prévu d’ailleurs, les difficultés s’amoncellent pour un Emmanuel Macron beaucoup plus

Depuis le début de la guerre en Ukraine, ni la Hongrie ni la Slovaquie n'ont réduit leur dépendance à la Russie.  Les deux États disposent en effet d'une exemption leur permettant, depuis le début du conflit ukrainien, de continuer à importer du pétrole russe. Loin de diminuer, cette dépendance s'est même accrue : selon un rapport du FMI publié le mois dernier, la part du brut russe dans la consommation hongroise est passée de 66% en 2018 à 86% en 2024.

L UE a évité un veto de la Hongrie et de la Slovaquie. La Hongrie a même annoncé qu'elle contesterait l'interdiction devant la justice. Pour le ministre hongrois des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, la mesure est un contournement des règles d'unanimité requises pour les sanctions, déguisée en politique commerciale. C'est la reconnaissance que cet "ordre de Bruxelles" est impossible à accepter sans dommages économiques majeurs.

Le Kremlin a déjà condamné cette décision, prédisant à juste titre une perte de compétitivité pour l'Europe et des prix plus élevés pour les consommateurs. Il est difficile de lui donner tort.

Nous assistons à la faillite d'une caste politique qui a privilégié la symbolique et la soumission stratégique à la simple loi du réalisme économique. Le consommateur européen n'est pas la victime d'une fatalité extérieure, mais d'un choix délibéré de ses propres élites.


Partager cet article
Commentaires

S'abonner au Courrier des Stratèges

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter pour ne rien manquer de l'actualité.

Abonnement en cours...
You've been subscribed!
Quelque chose s'est mal passé
De Wever, seul Flamingant à résister à l'Europe allemande depuis 1914 ! par Veerle Daens

De Wever, seul Flamingant à résister à l'Europe allemande depuis 1914 ! par Veerle Daens

L'ironie est une garce, mes amis, et elle vient de s'inviter à la table de la comitologie européenne avec une pinte de bière tiède et un grand sourire sardonique. Regardez bien le spectacle : nous vivons un moment de torsion spatio-temporelle que même les auteurs de science-fiction sous acide n'auraient pas osé écrire. Commençons par le dernier délire de notre chère "Uschi" von der Leyen. La Commission, dans sa grande sagesse bureaucratique (et sa capacité infinie à dépenser l'argent qu'elle n'


CDS

CDS

Désintégration de l'ordre mondial ou perte de crédibilité de l'Occident à cause d'Israël? par Thibault de Varenne

Désintégration de l'ordre mondial ou perte de crédibilité de l'Occident à cause d'Israël? par Thibault de Varenne

Il flottait un parfum de fin de règne, ce jeudi 4 décembre 2025, dans l'immensité du Grand Palais du Peuple à Pékin. Emmanuel Macron, entamant sa quatrième visite d'État en Chine, a choisi de briser les conventions du langage diplomatique pour livrer un constat d'une gravité absolue devant son homologue Xi Jinping. « Nous faisons face au risque de désintégration de l'ordre international qui a apporté la paix au monde depuis des décennies », a-t-il lancé, le visage grave. Cette formule, « dési


Rédaction

Rédaction

Gaza: la Big Tech US au cœur des opérations militaires israéliennes

Gaza: la Big Tech US au cœur des opérations militaires israéliennes

Les géants technologiques US se positionnent en fournisseurs technologiques clefs de Tsahal, assurant les services cloud et d’IA nécessaires aux opérations militaires.Cette alliance lucrative entre la Big Tech US et l'armée israélienne pose des questions fondamentales sur la responsabilité éthique et légale de ces entreprises, désormais parties prenantes d'une guerre qui, sous couvert d'opérations ciblées, a mené à des massacres de masse, notamment d'enfants. Un rapport de +972 Magazine lève le


Lalaina Andriamparany

Lalaina Andriamparany

Trump magicien réglant le conflit ukrainien en 24h : encore raté ! par Veerle Daens

Trump magicien réglant le conflit ukrainien en 24h : encore raté ! par Veerle Daens

Ah, la magie de la politique spectacle ! Vous vous souvenez de janvier 2025 ? L’époque bénie où Donald Trump, le messie orange de l’immobilier, nous jurait la main sur le cœur (et l’autre sur son compte X) qu’il réglerait la guerre en Ukraine en 24 heures. Chrono en main. Pas 25, pas 48. Vingt-quatre. Nous sommes le 3 décembre 2025. Si mes calculs sont bons — et contrairement aux budgets de l’État, les miens tombent juste —, cela fait environ 8 000 heures que le compteur tourne. Et devinez q


CDS

CDS