Avec deux pages et 15 motifs de sorties possibles, le gouvernement a renoncé samedi aux attestations dérogatoires pour les déplacements en journée dans les 10 km entourant le domicile, destinées aux 21 millions de Français concernés par le troisième confinement. La parution d’attestations de deux pages aux nombreuses options et subtilités avait suscité un tollé. Et maintenant, tout le monde se rejette la responsabilité de cet énorme cafouillage bureaucratique. Retour sur un couac, symptomatique d’un Etat ventripotent !

Personne n’y comprenait plus rien. La “troisième voie“, exception française, était une impasse. Critiquée et moquée, le gouvernement a fini par abandonner partiellement l’attestation de sortie. Après un conseil de défense (mercredi matin), un tête à tête entre Emmanuel Macron et Jean Castex (jeudi midi), un comité restreint à Matignon (jeudi après-midi), le plan gouvernemental prévoyant un 3ème confinement était présenter aux 21 millions de Français concernés (jeudi soir). Parmi les mesures prises, il y avait la grand retour de l’attestation de sortie en journée.
Le nouveau modèle d’attestation de sortie devait obligatoirement être publié avant samedi, 6 heures du matin. Les plus hauts fonctionnaires de l’Etat produisent alors une attestation incompréhensible, issue des consignes de leurs responsables politiques.
Exemple : “Dans les départements soumis à des mesures renforcées, les déplacements ne sont autorisés qu’au sein du département ou d’un périmètre défini par un rayon de 30 km autour du lieu de résidence sauf pour les items signalés par un astérisque sur la présente attestation ainsi que pour les déplacements autorisés par l’article 56-5 du décret du 29 octobre modifié“. Quand aux habitants des autres départements, ils “ne peuvent entrer dans les départements soumis à des mesures renforcées au-delà d’un périmètre défini par un rayon de 30 km autour de leur lieu de résidence que pour les items signalés par un astérisque sur la présente attestation ainsi que dans le cadre de déplacements de longue distance conduisant seulement à un transit par une zone soumise à des mesures renforcées“.
L’ensemble vite remplacé par… deux formulaires, 8 à 12 motifs chacun, trois pages au total, mais la possibilité de sortir sans eux pour se promener (en journée, à moins de 10 km de chez soi, avec un justificatif de domicile).
A qui la faute ? Grotesque et inapplicable l’illisibilité de ce document aurait dû sauter aux yeux de n’importe quel conseiller d’Emmanuel Macron. L’Elysée a fait savoir que le président a découvert l’attestation samedi dans la matinée et qu’il était très en colère. Matignon reconnaît un “problème de lisibilité“ mais précise que le Premier ministre n’a pas vu le formulaire avant sa publication. Même son de cloche du côté de la place Beauvau.
Les auteurs de ce texte seraient, en effet, l’œuvre (le chef d’œuvre même) des membres de la cellule interministérielle de crise rattachés à Matignon. La France étouffe sous une bureaucratie qui produit de la réglementation pour justifier de son existence. Même s’il faut bien reconnaître que les annonces de jeudi dernier étaient souvent confuses. La France est toujours celle des “rond-de-cuir“ décrite par Courteline. Le magazine Challenge a recensé quelques chiffres pour illustrer cette bureaucratie : 400.000 normes en vigueur, 80 codes, 1700 décrets par an.
Que retiendront les Français de tout cela ? Vont-ils appliquer des règles qu’ils ne comprennent pas ? Les Français qui marchent sur cette “troisième voie“ ont la sensation de marcher sur la tête. Même si le ministre des PME a indiqué dimanche que le gouvernement serait amené à corriger “ce qui est trop absurde”.
 
       
    
     
                   
       
       
       
         
      