Ce vrai soulèvement iranien dont personne ne veut parler en Europe occidentale, par Yves-Marie Adeline

Ce vrai soulèvement iranien dont personne ne veut parler en Europe occidentale, par Yves-Marie Adeline


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Deux photos: ci-dessus, des femmes révoltées contre le régime, avec le drapeau d'avant la révolution. Et ci-dessous, une nouvelle photo de la honte, celle, parmi tant d’autres, publiée par des journalistes occidentaux, qui témoigne une nouvelle fois de leur ignorance autant que de leur paresse. Elle est légendée « Des centaines d’Iraniens défilent pour des personnes tuées par la police à moto », et son crédit est l’AFP.

Les auteurs n’ont même pas vu que des femmes en burqua sont présentes, que l’une d’elles à gauche brandit le portrait du guide suprême Khamenei, et que le drapeau est celui de République islamique ; tandis que les vrais manifestants d’aujourd’hui arborent celui de l’ancien régime – comme nous l’avons expliqué dans un article précédent – que les femmes montrent leurs cheveux, voire brûlent leurs voiles, et que tout le monde, naturellement, conspue Khamenei pour ce qu’il incarne. Autrement dit, cette photo est ancienne, elle précède la révolte actuelle et n’a évidemment aucun rapport avec elle.

Il y a quelques semaines encore, le peuple iranien était seul. C’est moins vrai aujourd’hui : les chancelleries occidentales se réveillent, peut-être pas par solidarité sincère avec le peuple révolté, mais seulement pour affaiblir un régime qui s’est rangé du côté de la Russie dans la guerre ukrainienne. Pour les Iraniens, c’est mieux que rien, mais c’est encore à eux seulement de prendre tous les risques pour espérer renverser un régime qui n’a jamais hésité, depuis le début de son existence en 1979, à tuer sans retenue tous ceux qui s’opposaient à lui.

Aucune image des médias occidentaux, aucun reportage, seuls des selfies pris par les émeutiers nous renseignent sur ce qui se passe. Dans le métro de Téhéran, une femme brûle son voile au milieu du public qui crie : « C’est l’année du sang, nous renverserons le Dictateur (Khamenei) ».

Est-ce peu après qu’un autre selfie montre la foule sur un quai, victime de tirs de la police provoquant un mouvement de panique ? Nous l’ignorons encore.

On a vu aussi la maison-musée de Khomeiny, le sinistre fondateur de la République islamique, incendiée par une autre foule :

Des policiers sont régulièrement tués :

Plus légèrement, des jeunes gens s’amusent à faire sauter les turbans des mollahs qui passent dans la rue…

Quelques rares comédiennes européennes ont exprimé leur soutien, mais on attend toujours que se manifestent des femmes politiques qui ont fondé leur carrière sur un féminisme d’imposture, en particulier celles qui, depuis lors, ont adopté la stratégie de l’islamo-gauchisme avec l’espoir d’arriver au pouvoir un jour, dans une Europe dont les institutions, rappelons-le, penchent dans le sens exactement contraire à celui de l’actuelle révolution iranienne.

Il est possible que nos médias aient initialement souhaité maintenir une sorte d’omerta sur ce qui se passe là-bas, qui a commencé par une révolte des femmes et continue par une révolte populaire plus générale. Certains commentateurs patentés tentent aujourd’hui d’égarer l’opinion en proposant des analyses fallacieuses de l’événement, comparé au défilé des femmes russes en 1917 qui demandaient du pain, tandis qu’ici, les Iraniennes demandaient seulement que soit enfin reconnue et respectée leur féminité. Compte tenu de l’évolution à laquelle on assiste à l’intérieur de l’Union européenne, on en vient à se demander si la réaction à l’islamisation de nos sociétés ne viendra pas de l’Iran ! Ce qui, reconnaissons-le, serait un comble d’ironie dont seule l’histoire détient le secret.


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