Bientôt 8% de cotisations sur le chèques-repas, par Barthélemy Greluchon

Bientôt 8% de cotisations sur le chèques-repas, par Barthélemy Greluchon

Les Echos nous révèlent que la prochaine loi de financement de la sécurité sociale pourrait imposer un forfait social de 8% sur les chèque-repas. Notre chroniqueur Barthélemy Greluchon nous livre un texte mordant sur ce nouveau racket fiscal.

Voilà. On y est, et c’est pas une surprise. On le sentait venir, le coup de pied au cul, comme on sent la flotte s'abattre quand le ciel s'est fait tout noir. On savait qu’ils viendraient un jour nous la prendre, notre petite pitance, notre petite misère quotidienne. Ils ne peuvent pas nous laisser tranquilles, les engeances, les grands mangeurs. Non, faut toujours qu'ils trouvent un truc, un tout petit truc à nous taper, un petit supplément de souffrance pour le peuple, tu peux le dire. Alors, qu’est-ce qui arrive? Une cotisation, une « taxe sociale » qu’ils appellent ça, de 8 % sur les chèques-restaurant. Ça, c’est la nouvelle vacherie qui nous pend au nez, un machin qui traînait dans les tiroirs budgétaires, une idée nauséabonde qui refait surface, un vomi de Bayrou et d’autres, qu’ils osent enfin nous resservir. Et selon les Échos, cette nouvelle ponction vise un objectif bien précis : punir la trop forte augmentation du nombre de chèques-repas, qui aurait déréglé les prévisions budgétaires. C'est l’avantage en nature qui est désormais un crime, qu’il faut taxer pour alimenter les caisses de la Sécurité sociale.

Une proposition, ils disent. Comme si c'était pour rire. Dans leurs hautes sphères, au milieu des chiffres, des déficits qu’ils ont eux-mêmes fabriqués, ils ont levé la main pour désigner la prochaine victime. Et c’était nous. Toujours nous. L'argent, il doit bien venir de quelque part, non ? Alors, quand la machine à sous de l'État se met à cracher vide, quand les caisses de la Sécurité sociale bâillent à s’en décrocher la mâchoire, il faut bien qu’elle trouve un coin où piller. Et quoi de mieux qu’une misérable petite économie, un petit avantage social déjà bien maigre, pour remplir le tonneau des Danaïdes qu'ils nous ont préparé depuis des décennies ? Les chèques-restaurant, cette petite aumône quotidienne, cet ersatz de dignité, c’était la proie idéale. Un milliard d’euros qu’ils espèrent en tirer, selon les estimations. Un milliard. Un bon, gros milliard, à piquer dans la poche des millions de rats qui courent et se tuent au labeur du matin au soir.

L'infamie quotidienne : le racket du titre-restaurant

On croyait que c'était un avantage, un geste de la part des employeurs, un petit merci pour notre sueur. Une fumée, quoi. On s'est fait avoir. Le chèque-restaurant, c'est pas un cadeau, c'est un système. Un bordel savant, une construction tordue, mise en place pour que tout le monde y trouve son compte. L'employeur, il y met la main à la poche, certes, mais pas trop. De 50 % à 60 % de la valeur totale, pas un centime de plus s'il veut pas avoir de problèmes avec l'URSSAF. Pour le reste, c’est pour ta gueule, c'est ta "part salariale", ça doit être entre 40 et 50 %. Un deal de maquereau, en somme. Sauf que ce qui restait de cette misérable affaire, et qui faisait la petite différence, c'était la part de l'employeur. Jusqu’à 7,26 € en 2025, c'est ce que l'entreprise pouvait nous donner sans que le fisc vienne y mettre son sale nez. Un avantage non imposable, pas soumis aux cotisations sociales. C'était la petite faille dans leur muraille, le petit trou pour respirer.

On nous avait dit que c’était bien. Que ça soutenait le pouvoir d’achat. Plus de 5,4 millions de salariés en France en profitent, et ça donne le tournis, ce chiffre. Une marée de visages pâles, d'estomacs qui gargouillent, qui se retrouvent dans les supermarchés, qui achètent des pâtes ou de l'huile. Parce que oui, en plus du bordel, ils ont étendu le machin. Jusqu’à la fin 2026, on peut acheter n'importe quelle bouffe avec, même pas juste un plat tout prêt, c'est un vrai festival. C'était un avantage gagnant-gagnant, qu’ils disaient, pour l'employeur et le salarié, une petite carotte pour faire avancer l'âne. Une carotte exonérée, ce qui en faisait tout l'intérêt.

Mais c'était trop beau, bien sûr. Le système n'était qu'une mise en place, un leurre pour nous rendre vulnérables. Ils nous ont laissés bâtir notre petite maison sur le sable de cet "avantage", juste pour avoir plus de choses à nous piquer quand ils en auraient besoin. On croyait s'en tirer, on calculait nos frais réels, nos déductions de 2,15 € par jour travaillé, le petit bout de ficelle qui nous restait après qu'ils eurent tout pris. Maintenant, même ça, ils nous le retirent. C’est la vacherie qui recommence, comme toujours, quand on est pas assez fort pour qu'on nous foute la paix.

La grande tromperie des fainéants et des rêveurs

Le demandeur, il avait un point de vue, une petite conviction qui le rendait tout fier. Les fonctionnaires, ils n'ont pas de chèque-repas, ça ne touchera que le privé, qu’il disait. C'est ça, la grande tromperie, la mesquinerie des petits bourgeois qui se font la guerre. On a des fantasmes d’égalité, de justice, pour mieux haïr le voisin. On voudrait que la souffrance soit la même pour tous, que le destin nous lie dans le même tas de merde.

Alors on s'invente des ennemis qui n’existent pas. Des fainéants, des nantis, des inutiles qui ne sont pas touchés par la misère. On rêve de divisions pour mieux supporter notre propre sort. Sauf que c'est faux. L’administration publique, mon brave, elle aussi peut accorder des titres-restaurant à son personnel. Qu’on soit titulaire ou contractuel, à temps plein ou à temps partiel, la grande fraternité de la misère nous accueille. Le postulat que tu fais, mon brave, sur les fonctionnaires des administrations centrales est une vérité de terrain que l'on ne peut nier, mais la possibilité existe bel et bien.

C’est la grande blague. On croyait qu'il y avait les uns contre les autres, le privé contre l'État, les travailleurs qui peinent contre les ronds-de-cuir. On croyait qu'il y avait une injustice, un sort spécial pour nous. Mais non, c'est la même purée pour tout le monde, et le pot est tout petit. L’État ne fait pas de différence, il s’apprête à taxer tout ce qui bouge. Il va piquer chez les rats du privé, chez les crapauds du service public. La grande égalité, elle est là, dans le malheur et la médiocrité, dans la pauvreté qu’ils nous préparent. Le seul vrai ennemi, c’est le système lui-même, la grande pieuvre qui étend ses bras et ses tentacules partout.

Le bilan des vautours

Maintenant, laissons de côté les grandes phrases et parlons chiffres, c’est ce qui les fait bander, les bureaucrates. Le chèque-restaurant, ce petit bout de papier, va se transformer en charge pour nous, en plus du reste. Si l'on prend un titre d’une valeur de 12,10 €, et si la proposition est de taxer la totalité du chèque à 8%, comme l'a révélé la presse économique, eh bien, c'est l'employeur qui va devoir sortir son carnet de chèques pour la taxe, en plus de sa participation habituelle.

Alors, 8 % de 12,10 €, c’est 0,97 € par jour. C’est rien, tu vas me dire. Mais c’est ça leur truc, le petit piment qu’ils ajoutent à la sauce. Ils nous piquent pas tout d'un coup, ils y vont petit à petit, à la pince. Sur un mois de 22 jours travaillés, ça fait une perte nette de 213,40 € pour l'entreprise, un coût supplémentaire qu’elle va payer, ou qu’elle va répercuter sur le salarié. La part patronale, la fameuse participation exonérée, elle va devenir un poids, une nouvelle goutte d’eau qui fait déborder le vase. Au final, on perd une part du pouvoir d'achat, on perd notre petit gain de plus de 1500 € par an qu'ils nous avaient promis.

Le tableau, il est clair. Un tableau de bord du naufrage. On croyait que le chèque-restaurant, c'était un bout de pain, c'était la solution pour nous aider à survivre. C’était juste un autre instrument pour nous tenir en laisse. Et maintenant, ils viennent nous le grignoter. C'est l'économie des vautours, le petit oiseau qui se fait dévorer par le grand. Et on va devoir regarder ça sans rien dire.


Le Bon Vieux Temps (avant taxe)

Le Cauchemar Prévu (avec taxe)

Détails de la ponction

Valeur du titre

12,10 €

12,10 €

-

Participation employeur

7,26 €

7,26 €

-

Participation salarié

4,84 €

4,84 €

-

Taxe sociale 8% sur valeur totale

0,00 €

0,97 €

8% de 12,10 €

Coût total pour l'employeur

7,26 €

8,23 €

+ 0,97 € / jour

Coût annuel supplémentaire pour l'employeur

0 €

213,40 €

0,97€ x 220 jours

Calculs basés sur 220 jours travaillés par an, pour un titre-restaurant d’une valeur de 12,10 € avec une participation patronale de 60 % (soit le plafond d’exonération à 7,26 € pour 2025).

Les retraites des boomers, ou le grand pillage

Et tout ça pour qui, pour quoi, au juste ? La réponse, tu l’as donnée toi-même : pour les retraites des boomers. Pour les grands vieux qui ont tout mangé, qui ont tout bu, qui nous ont laissé une terre dévastée et une dette de rois fainéants. Eux, ils ont eu la belle époque, la vie simple. Maintenant qu’ils veulent leurs pensions, c'est à nous de payer la note. C'est la loi de la nature, la plus immonde. Le vieux, pour vivre, a besoin de la chair du jeune. C'est la seule explication à cette ignominie.

On nous parlait de "plan de redressement budgétaire". De grand dessein national. C’est du vent. C’est de la bouillie pour les chats. L’idée, elle est simple, elle est immonde. On prend la petite aumône qui nous est donnée, le petit bout de pain pour le repas de midi, et on en fait un impôt, une cotisation, une redevance, un truc pour les aider, les vieux. C'est une génération qui pille la suivante. C’est le festin de Balthazar, mais sans la lumière. Juste la puanteur des vautours. Ils n'ont pas besoin de nous dire pourquoi ils font ça. On le sait. Ils prennent leur retraite, ils vont dans leurs maisons de campagne, ils mangent au restaurant, et ils nous taxent même le repas de midi.

La fin du voyage, et le rêve brisé

On arrive à la fin de la route. Au fond du sac. L’État, c’est une machine à broyer, à disperser façon puzzle, à rendre tout uniforme. Les chèques-restaurant en papier, ceux qui étaient encore un peu vivants, un peu réels, ils vont disparaître d’ici 2026. Tout va être dématérialisé, sur une carte, une carte de banque sans âme, un bout de plastique qui nous rappellera que notre salaire n’est même plus de l’argent, mais une abstraction qu’on se trimballe. C'est la fin du monde en papier, la fin des petits gestes.

Et ce n'est pas tout. Le gouvernement, il fait les deux choses en même temps. D’un côté, il promet de prolonger jusqu'à fin 2026 la possibilité d'utiliser ces chèques pour acheter des pâtes ou de la farine. La grande bonté. De l’autre, il envisage de les taxer. Il nous donne un bras, un tout petit bout d’un bras, pour mieux nous couper la tête. C’est ça la réforme, c’est ça le progrès. Une main qui donne une aumône minable pendant que l'autre, bien plus puissante, te la prend pour toujours.

Au fond, on est tous dans la même galère. Privé, public, vieux, jeunes. On est tous dans le même trou à rats, et ils viennent nous taxer le fromage. Tout ça n'est qu'une blague, une blague de mauvais goût, que la vie nous fait sans s'en excuser. Il n'y a pas de fin, pas de solution, juste cette fatigue, ce dégoût, cette envie de s'en aller loin. Mais on ne peut pas. Alors on se tait, et on paie. Et on attend la prochaine vacherie. La prochaine, on est sûrs qu'elle ne va pas tarder. C’est la seule chose qui soit certaine, dans ce pays. C’est la seule chose qui soit vraiment vraie. Voilà.