Avant la crise des Gilets Jaunes, le déficit s’est approché des 100 milliards annuels…

Avant la crise des Gilets Jaunes, le déficit s’est approché des 100 milliards annuels…


Partager cet article

Un déficit de l’État à 100 milliards € ? Avant même la crise des Gilets Jaunes, c’est la trajectoire qui suivait le budget, selon les chiffres publiés par Bercy et passés relativement inaperçus. Ils montrent que, avec ou sans « résistance » de la rue, la situation budgétaire française se dégrade dangereusement.

Les Gilets Jaunes ont bon dos… Alors que leur mouvement commençait à peine et que le gouvernement se montrait inflexible vis-à-vis d’eux, les chiffres de l’atterrissage budgétaire 2018 témoignaient d’une importante dégradation de la situation. Celle-ci mérite qu’on s’y arrête un instant.

Un déficit à près de 100 milliards €

Comme l’indique le graphique officiel ci-dessus, le déficit budgétaire atteint désormais des records historiques. Alors que, en novembre 2017, il se situait autour de 85 milliards €, il s’enfonce au-delà des 95 milliards € un an plus tard. Il avait déjà frôlé les 100 milliards en août, et s’était réduit grâce au paiement de l’impôt sur le revenu en septembre.

On suivra avec attention la performance de décembre. En théorie, le déficit devrait diminuer notamment avec la levée de l’impôt sur les sociétés. L’an dernier, il s’était ainsi résorbé de plus de 16 milliards sur le dernier mois de l’année.

Décembre 2018 sera-t-il aussi profitable que décembre 2017? La réponse tombera au début du mois de février, puisque les situations mensuelles sont livrées avec deux mois de retard. Cette échéance sera importante pour imaginer la trajectoire 2019.

L’impact prévisible des Gilets Jaunes

La difficulté que devrait rencontrer l’État tient évidemment à l’impact du mouvement des Gilets Jaunes sur les dépenses… et sur les recettes, dès le mois de décembre 2018. Cet impact devrait durer, voire s’amplifier dans le temps, et donner une indication sur ce que seront les chiffres 2019. La performance de décembre sera cruciale pour la compréhension budgétaire d’une année qui s’annonce de toute façon comme très difficile.

En attendant, l’explication de cette course aux 100 milliards de déficit tient à quelques phénomènes: la baisse de rendement de l’impôt sur les sociétés, déjà signalée à l’automne, et pressentie dès l’été, la hausse de l’investissement public et des dépenses d’intervention, la baisse de rendement des « petits impôts ».

Le mouvement des Gilets Jaunes devrait accentuer la baisse de rendement de l’impôt sur les sociétés par son impact global sur l’activité économique. Il devrait aussi faire exploser les dépenses d’intervention que le gouvernement est contraint de lâcher pour rétablir la paix dans les rues.

Le découragement de Bercy

Dans ce contexte difficile, l’intervention du prélèvement à la source ne devrait pas améliorer la situation. Le versement d’une avance en janvier sur les crédits d’impôt a coûté 5,5 milliards au Trésor Public. La disparition des tiers trimestriels devrait modifier en profondeur la trésorerie de l’Etat.

Dans ce contexte, le blues du ministère des Finances signalé par la presse ne devrait pas se tarir: les temps sont durs, et la situation budgétaire se tend.

En outre, la technicité de Bercy fait l’objet de critiques qui ne contribuent pas à consolider l’arrogance bercyenne habituelle.

Une ambiance très fin de règne

Dans l’ensemble, tout laisse à penser que le mandat d’Emmanuel Macron est à un tournant difficile à négocier. Les insiders le savent, qui commencent à quitter le navire. De façon assez manifeste, une séquence incertaine s’ouvre pour Emmanuel Macron.

De deux choses l’une: soit le Grand Débat confirme ses options en matière de réforme, et il pourra repartir d’un pied solide pour entamer les projets encore en « bibliothèque » (comme la réforme des retraites). Soit le Grand Débat infirme ses orientations, et il n’aura d’autre choix que de changer d’équipe pour une nouvelle politique.

Dans tous les cas, le maintien d’Edouard Philippe semble relativement compromis.


Partager cet article
Commentaires

S'abonner au Courrier des Stratèges

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter pour ne rien manquer de l'actualité.

Abonnement en cours...
You've been subscribed!
Quelque chose s'est mal passé
Santé et niveau de vie: comment l'État-providence a creusé le fossé des inégalités

Santé et niveau de vie: comment l'État-providence a creusé le fossé des inégalités

Malgré un État-providence omniprésent et un budget social colossal, l'écart de l'espérance de vie entre riches et pauvres se creuse. Selon l’étude publiée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), lundi 15 décembre, les plus modestes vivent moins longtemps, et l’écart se creuse. Un constat brutal qui interroge l’efficacité réelle des politiques sociales et sanitaires. La promesse centrale de l’État social français est connue : réduire les inégalités par la red


Lalaina Andriamparany

Lalaina Andriamparany

Bart De Wever, agent de Poutine ou seul adulte dans la pièce? par Veerle Daens

Bart De Wever, agent de Poutine ou seul adulte dans la pièce? par Veerle Daens

Le Premier Ministre belge, Bart de Wever, a déclaré lors d'une conférence universitaire, que non seulement la Russie ne perdrait pas la guerre, mais qu'il n'était pas souhaitable qu'elle la perde. Une vraie provocation vis-à-vis de l'OTAN. Sarcasme. Réalité. Et pas un seul kopeck de subvention. Ah, Bruxelles! Ses gaufres, son Manneken Pis, et ses bureaucrates non élus qui jouent au Monopoly avec votre compte en banque. C'est la saison des fêtes, et comme cadeau, la Commission Européenne a déci


CDS

CDS

L'UE meurt plus vite avec l'Ukraine qu'avec le Frexit, par Thibault de Varenne

L'UE meurt plus vite avec l'Ukraine qu'avec le Frexit, par Thibault de Varenne

Ce 16 décembre 2025 restera sans doute gravé dans les annales de l'histoire européenne non pas comme le jour où l'Union a sauvé l'Ukraine, mais comme le moment précis où elle a décidé de sacrifier ce qui lui restait de principes fondateurs — la liberté d'expression, la sécurité juridique, et la souveraineté nationale — sur l'autel d'une guerre qu'elle ne peut plus gagner, mais qu'elle s'interdit de perdre. La machine bruxelloise, cette formidable créatrice de normes devenue une machine à broyer


Rédaction

Rédaction

Monopole de la force, monopole de l'abus ? Le cas troublant de la police des mineurs
Photo by Geoffrey Moffett / Unsplash

Monopole de la force, monopole de l'abus ? Le cas troublant de la police des mineurs

Un ancien chef de la brigade des mineurs de Rouen, âgé de 51 ans, a été mis en examen pour agressions sexuelles sur deux adolescentes et détention d'images pédopornographiques. Incarcéré à Évreux, il reconnaît partiellement les faits. Ce scandale révèle l'infiltration des réseaux pédophiles au cœur des institutions censées protéger les vulnérables. Dans un communiqué du parquet d'Évreux daté du 15 décembre, les détails glaçants d'une affaire impliquant un policier de haut rang émergent. Ce majo


Lalaina Andriamparany

Lalaina Andriamparany