Que se passera-t-il en France quand viendra le Frexit ? Par Florent Machabert

Imaginez : Emmanuel Macron dissout à nouveau l’Assemblée nationale courant novembre 2025 ou en 2026 puis/ou démissionne et le tandem Marine Le Pen/Jordan Bardella se retrouve à l’Élysée et/ou à Matignon.

Le RN, avec ou sans alliés selon le scénario, fait voter, tiraillé entre sa base populaire et les cadres et chefs d’entreprise qui, en désespoir de cause, ont voté pour lui – n’en pouvant plus d’un budget Lecornu II les accablant de nouveaux impôts sans réduire d’un centime le poids de l’État – font voter, donc, un budget mi-figue mi-raisin, plutôt conforme au contre-budget présenté, à savoir 36 Mds € d’économies nettes, moyennant quelque 50 Mds € de baisse des dépenses publiques et environ 14 Mds € de baisse des prélèvements obligatoires. Les premières mesures auront déjà fait tousser les marchés financiers qui croyaient avoir échappé à Jean-Luc Mélenchon, mais qui se retrouveront quand même avec le seul « plan de relance par la consommation » de toute la zone euro (13,5 Mds € de baisse de la TVA sur l’énergie et cent produits de première nécessité) et une kyrielle de nouveaux impôts s’immisçant dans le droit de propriété des entreprises et faisant fuir les capitaux : une « taxe sur les superdividendes » d’1,3 Md €, un « IFF » (impôt sur la fortune financière) de 4 Mds €, chimère issue d’un croisement entre l’ISF et l’IFI, une colossale « taxe sur le rachat d’actions » de plus de 8 Mds € et une « TTF intraday » (taxe sur les transactions financières intra-journalières) de 3 Mds € ! Mais ce n’est pas tout : la baisse d’un tiers (8,7 Mds €) de la contribution de la France au budget de l’Union Européenne, qui n’aura pu obtenir l’unanimité des membres du Conseil Européen, aura fait l’objet d’une décision unilatérale de la France, provoquant un « Frexit par accident ».

Et là, qu’arriverait-il à nos 3 500 Mds € de dette publique ?

Le scénario d’une restructuration technique : la Lex Monetae, oui mais…

L'une des premières questions qui se poserait concernerait le sort de la dette de l’État français libellée en euros. L’hypothèse d’un Frexit accidentel mettrait en lumière le principe de droit international privé connu sous le nom de lexmonetae, lequel stipule que la loi du pays émetteur de la monnaie régit la définition et l'exécution de ses obligations monétaires. Dans le contexte d'une sortie de l'euro, ce principe permettrait donc théoriquement à la France d'exercer sa souveraineté monétaire en redénominant en NFF, pour Nouveaux Francs Français (sa nouvelle monnaie nationale), une grande partie de sa dette publique.

Mais, dans la pratique, les choses seraient un peu différentes. Pour les quelque 80 à 95% de la dette souveraine française régie par le droit français (on peine à trouver un chiffrage plus fin), la théorie s’applique sans problème, soit une redénomination unilatérale en francs, avec l’imposition d'un taux de conversion fixe, par exemple, pour faire simple, 1€ = 1 NFF.

Il existe toutefois un risque d’inconstitutionnalité d’une loi rétroactive qui chercherait à convertir des dettes existantes, laquelle ne serait dès lors pas reconnue par les tribunaux français ou internationaux. Mais ce serait tant que la France demeure liée au droit communautaire. Si, et c’est le cas dans notre scénario, elle s’en libère en même temps que de la monnaie commune, un bon accord politique ou une législation ad hoc, préparée en amont du Frexit, permettrait d’éviter les contrôles de capitaux et le krach bancaire qui n’ont pas épargné la Grèce, laquelle en définitive n’a même pas été sortie de l’UE (merci François Hollande).