Le vol des joyaux de la Couronne n'est pas le vrai scandale. Le vrai scandale, c'est que personne n'a payé. En sept minutes, une poignée de criminels a exposé la faillite d'une institution d'État, le Louvre, mais surtout la faillite morale d'un système : la république des copains-coquins, où la responsabilité est un concept réservé au bas peuple.

Au cœur de cette débâcle se trouve Laurence des Cars, présidente-directrice du musée. Son maintien en poste est une masterclass sur le privilège de caste. Imaginez un instant qu'elle se soit appelée Dupont. Issue d'une famille modeste, gravissant les échelons à la seule force de son travail. Après une telle humiliation nationale, elle aurait été jetée en pâture à l'opinion publique avant même que les vitrines brisées ne soient balayées.
Mais Madame des Cars n'est pas une Dupont. Elle est une des Cars , héritière d'une lignée qui a su monnayer son prestige aristocratique à travers les générations. Son grand-père, Guy des Cars, vendait des romans de gare par millions ; son père, Jean des Cars, est le chroniqueur attitré du Gotha européen (si vous voulez tout savoir sur les réseaux qui ont porté Laurence des Cars là où elle est, ne manquez pas notre papier sur le sujet). Elle n'a pas simplement hérité d'un nom, mais d'un bouclier social, d'un passe-droit pour l'impunité. Son parcours, des meilleures écoles aux plus hauts postes de la culture d'État, n'est pas le fruit du mérite seul, mais la consécration d'un déterminisme social.

L'échec était pourtant écrit, documenté, et ignoré. Pendant plus de vingt ans, la Cour des comptes a sonné l'alarme : sécurité défaillante, équipements obsolètes, salles entières sans caméras. Mais dans la bureaucratie étatique, un rapport n'est pas un appel à l'action, c'est un document à classer. L'État a préféré lancer un « schéma directeur » à 80 millions d'euros, un monstre bureaucratique servant d'alibi pour ne rien faire, pendant que le cœur du patrimoine français devenait une passoire.
Quand le désastre est arrivé, la caste a fermé les rangs. La ministre a refusé la démission de façade de Madame des Cars, validant ainsi l'incompétence. Le message est clair : l'échec n'a pas de conséquences quand on est du bon côté de la barrière. La responsabilité est pour les autres.
Cette affaire n'est pas une anecdote. C'est le symptôme d'un État obèse et sclérosé, qui protège ses élites au détriment de ses missions fondamentales. Le vol du Louvre n'est pas seulement une perte matérielle ; c'est la preuve que la France n'est plus une république de citoyens, mais une oligarchie où le nom de famille pèse plus lourd que la compétence.