Après une grande campagne sur l'euro numérique, la BCE souligne l'importance de garder du cash à la maison pour faire face à des troubles...
Dans une campagne de communication surréaliste, la Banque Centrale Européenne (BCE) — l'institution même qui préside à la dématérialisation de la monnaie — a récemment lancé un avertissement digne de la Guerre Froide : « Restez calme et gardez des espèces ». Le conseil est précis : chaque citoyen devrait conserver chez lui de quoi tenir 72 heures en cas de crise majeure.
La justification officielle invoque des menaces modernes et aseptisées : cyberattaques, pannes de courant, black-out numérique. Mais ce signal, venant du cœur du système, est trop inhabituel pour être pris au pied de la lettre. Faut-il y voir la simple prévoyance d'un État-nounou, ou l'aveu implicite que le système financier lui-même est plus fragile qu'on ne nous le dit?
En réalité, la BCE ne fait que redécouvrir tardivement les vertus fondamentales de l'argent liquide, des vertus que les citoyens attachés à leurs libertés n'ont jamais oubliées.
Premièrement, le cash, c'est la liberté. Il est le dernier rempart contre la surveillance totale des transactions. Chaque paiement numérique laisse une trace, chaque dépense est une donnée. L'argent liquide, lui, garantit l'anonymat et protège la vie privée, un droit fondamental que l'État et les géants de la tech grignotent chaque jour.
Deuxièmement, le cash, c'est l'autonomie. Il fonctionne sans compte bancaire, sans terminal, sans connexion internet. C'est le seul moyen de paiement véritablement inclusif et résilient, le seul qui ne dépend d'aucune infrastructure centralisée et vulnérable. Quand tout s'effondre, les billets et les pièces fonctionnent encore.
Les citoyens, d'ailleurs, ne s'y trompent pas. C'est le fameux « paradoxe du cash » : alors que son usage pour les paiements quotidiens diminue, la demande de billets en tant que réserve de valeur explose, surtout en temps de crise (pandémie, crise de 2008). Les gens l'utilisent moins, mais ils y sont plus attachés que jamais, car ils savent instinctivement que c'est le seul véritable actif refuge.
Alors, pourquoi cette campagne soudaine? La BCE craint-elle une panique bancaire? En encourageant les gens à constituer des réserves avant la crise, elle cherche à éviter une ruée massive vers les distributeurs qui pourrait faire vaciller des banques saines.
Cette communication est donc un double aveu. C'est la reconnaissance que la monnaie numérique nous rend dépendants et vulnérables. Mais c'est surtout un signal faible, peut-être involontaire, que des turbulences économiques plus profondes pourraient être à l'horizon. Quand l'architecte du système vous conseille de garder une bouée de sauvetage à portée de main, il est peut-être temps de se demander si le navire ne prend pas l'eau.
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